Samedi 24 Mai 2025
©Clément L'hôte
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Date
24.05.2025
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La tradition veut que les Bourguignons eussent leurs moines qui goûtaient la terre pour évaluer les terroirs. Les Champenois ont Geoffrey Orban. Avec les moines, il n’a rien de commun, seulement l’habitude de goûter la terre dans le cadre de ses dégustations géo-sensorielles, une méthode analytique qu’il enrichit au fil de ses carottages. C’est vers lui que Champagne de Vignerons s’est tourné à la fin des années 2000, pour qu’il partage son expertise.
Geoffrey Orban est directeur d’Educavin, consultant formateur et travaille étroitement avec Champagne de Vignerons, la bannière collective du Syndicat Général des Vignerons de Champagne. C’est à ce titre qu’il intervient aujourd’hui à Champagne Tasting pour deux rendez-vous de caractère : les champagnes bruts nature et les champagnes blancs de noirs.
Depuis plus de vingt ans, Geoffrey Orban est consultant pour de nombreux vignerons afin d’identifier le potentiel œnologique de leurs parcelles. S’il goûte la terre, il n’y a rien d’ésotérique dans sa démarche, cette approche sensorielle s’intègre à une méthode analytique qu’il décrit ainsi : « J’axe mes études parcellaires sur le profil sensoriel pour dégager le potentiel vinique du terroir. Ça passe par la dégustation de la terre, une étude tactile sur les textures, les odeurs de la terre renseignent aussi sur les micro-organismes présents. Je compile tous ces indices sensoriels qui permettent, in fine, d’établir le potentiel de la parcelle. » Certes, Geoffrey Orban ne mobilise pas de matériel sophistiqué, des méthodes d’analyses certifiées en laboratoire et pourtant, cette approche est tout aussi valable : « le potentiel vinique que je décèle, se vérifie toujours ».
Les résultats qu’il obtient sont reproductibles et surtout, même s’il sollicite ses sens, c’est selon une méthode toute scientifique : « J’ai une formation scientifique que j’ai tout naturellement transposée à mon approche des terroirs. J’émets des hypothèses, je me suis donné un protocole. De fait, c’est une expérimentation, qui mobilise toutes les personnes qui veulent bien s’impliquer, y compris les vignerons. »
La dégustation géosensorielle, pour être tout à fait complète, se prolonge dans le verre. C’est cette méthode analytique (et hédoniste, il faut bien l’avouer) qui a séduit le Syndicat des Vignerons de Champagne, notamment pour promouvoir une approche convaincante pour les consommateurs. C’est dans cette perspective qu’a été élaborée la classification : Vif, Fruité, Intense.
Pour identifier ces trois typicités, les vignerons du syndicat ont convié Geoffrey Orban à leur table de dégustation. « Nous avons centré les débats autour de la dégustation, je voulais que les caractères soient un lien sensoriel avec les consommateurs. » Avec le ressenti comme fil conducteur, le challenge consistait en l’élaboration d’un outil simple et efficace que tout le monde puisse s’approprier. Les caractères du champagne étaient nés, déclinables à tous les profils organoleptiques.
Trois qualificatifs pour les identifier tous. Dans le maquis des mentions, entre les différents dosages, les millésimés, les blancs de noirs, les blancs de blancs, etc. difficile de faire un choix, d’autant que les mentions ne sont pas des indices suffisants pour qualifier le vin. « On ne peut pas résumer le goût du champagne à une seule étape d’élaboration, même quand elle est aussi importante que le dosage. Un champagne sans dosage peut s’avérer vineux », remarque Geoffrey Orban. D’où l’idée des caractères, de se baser sur un ressenti et pas seulement sur une étape d’élaboration.
Avec les caractères de Champagne de Vignerons, il n’y a plus qu’à se laisser guider et à déguster, les vignerons champenois ont déjà fait leur travail d’analyse.
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