Vendredi 19 Septembre 2025
MilHoc ©DR
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19.09.2025
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Le château de Laubade, célèbre maison familiale, innove en lançant le premier whisky de maïs français du bas-Armagnac.
Depuis plus d’un siècle, le nom de Laubade incarne l’excellence de l’armagnac. Pourtant, au cœur du Gers, à Sorbets, Denis Lesgourgues a choisi d’ouvrir un nouveau chapitre en lançant un whisky atypique et profondément gascon : MilHòc, le mot local pour « maïs ». « C’est une nouvelle aventure pour nous, très excitante. Le projet avait commencé au premier confinement, mais la graine était semée depuis longtemps. L’idée était née en 2018 lors d’un trajet vers le Château Peyros, notre domaine de Madiran, en compagnie d’un client américain ». Sur la route, le paysage parle de lui-même : les parcelles de maïs alternent avec celles de vignes. Et le client se demande pourquoi avec tant de maïs à disposition, les Lesgourgues ne font pas de spiritueux. La question résonne immédiatement avec l’histoire familiale : le père et le grand-père travaillaient dans les semences de maïs, et le Gers et les Landes voisines sont les premiers producteurs français de la céréale. Denis qui s'occupe des eaux-de-vie de la propriété depuis 2001 se lance donc dans un brainstorming avec son maître de chai, François Laura qui vient d'arriver au domaine et son père Jean-Jacques. Ensemble, ils décident de franchir le pas. « J’aime sortir de ma zone de confort. C’est ancré dans la culture familiale. Dès 2019, j’ai réalisé que le maïs gascon apporterait une force et une singularité remarquables. Tester, ajuster, s'est révélé très stimulant et enrichissant. » La récente histoire américaine, marquée par la renaissance des distilleries artisanales, sert d’inspiration, Denis Lesgourgues y ayant vécu pendant sept ans. Mais l’ambition n'est pas de créer une copie du bourbon.
La première étape passe par la culture elle-même. Dès 2021, des semis spécifiques sont mis en place sur 17,5 hectares de réserve foncière de Laubade. Les variétés choisies sont précoces, non OGM, et non irriguées, semées de manière rapprochée pour limiter la concurrence entre les plants. « Le rendement volontairement bas (50 hl/ha) assure la qualité et réduit l’empreinte environnementale », souligne Denis Lesgourgues. Quant à l'orge, elle provient de Beauce. « Nous n'allons pas intégrer la brasserie tout de suite, car cela nécessite des investissements très importants, au moins un demi-million d'euros. Donc on achète le brassin à Météor en Alsace via nos contacts chez Hepp et Bercloux. Mais les travaux de R&D sur le maïs se font chez nous et les fûts, 500 actuellement, sont répartis dans sept chais entre l'Alsace et la Charente ». Les premiers essais de distillation ont été effectués en juillet 2021 dans un petit alambic à colonne. Mais l’alambic armagnacais de cuivre devient rapidement l’outil central du projet. Sa distillation lente et continue, à flamme nue, confère une texture ample et huileuse aux distillats. Chaque année en janvier, après la campagne de distillation de l'armagnac, trois semaines sont désormais consacrées au whisky dans le chai baptisé Maurice, du nom du grand-père de Denis qui avait acquis Laubade en 1974. « Cela nous permet d'utiliser l’alambic plus de quarante jours par an ». Il restait à penser le vieillissement des single grain. Là encore, l’approche est patiente et plurielle en utilisant des fûts neufs de chêne français et américains, des barriques fortement bousinées, des ex-fûts de bourbon de premier remplissage obtenus en troc direct avec une distillerie du Kentucky contre des fûts d’armagnac, et bien sûr des barriques ayant contenu les eaux-de-vie de Laubade. Ce large éventail compose une palette aromatique complexe, favorisant des assemblages différenciés pour deux whiskies non filtrés à froid et en couleur naturelle, sans additif. Même le flacon raconte cette identité : dessiné par un designer écossais et fabriqué en Italie, il reprend les stries des champs de maïs et les colombages landais. À travers lui, MilHòc affiche une ambition haut de gamme et internationale, ciblant déjà les marchés américain, britannique, allemand, suisse, italien et québécois. Plus qu’une diversification, il s’agit d’une véritable exploration. « Avec MilHòc, j’ai pris mon envol en créant un spiritueux inédit, conjuguant racines et audace, fidèle à notre culture mais ouvert au monde », conclut Denis Lesgourgues.
Le Premier-Né (45 %, 48 €), assemblage de 54 % de maïs et 46 % d’orge maltée française. Une gourmandise fruitée et pâtissière, un nez de céréales grillées, relevé d’agrumes, de vanille et d’épices douces, une texture souple et suave, avec une finale pimentée et salivante.
Première Flamme (50 %, 69 €), issue du même jus mais assemblé avec une proportion plus importante de fûts américains, pour un whisky plus opulent et épicé. Un nez riche de fève tonka, caramel, vanille, une bouche, ample, généreuse et enveloppante, une trame épicée d'intensité croissante se prolongeant sur des accents chocolatés et boisés. Produite à seulement 2 064 bouteilles.
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