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[Bordeaux] Tendances pré-primeurs du millésime 2022

Auteur

Michel
Sarrazin

Date

20.01.2023

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Le cabinet de conseil en viticulture ENOSENS présentait, cette semaine, les vins des propriétés qu’il conseille. Un exercice intéressant qui donne l’occasion de découvrir ce qu’est la tendance du millésime 2022 à Bordeaux, avant les primeurs.

Les primeurs sont la figure imposée des crus classés bordelais. Elle met en avant des crus classés solides qui demandent un paramétrage particulier du palais lors de la dégustation. Rien de cela cette semaine, les vins étant plus accessibles car le panel des 40 bouteilles présentées était un large reflet des 14 appellations bordelaises présentes. Chaque œnologue conseil d’ENOSENS était derrière sa table, prêt à commenter les vins des châteaux qu’il suivait. Toutes les bouteilles étaient anonymes : seules les indications d’appellation et de gamme apparaissaient.

L’impact de la climatologie de l’été 2022

La canicule et le déficit hydrique (- 47 % de pluviométrie au cours des trois mois d’été et 15 % à 20 % de perte de volume des raisins) auront marqué le millésime. On observe un léger déséquilibre sucre/acidité avec des degrés d’alcool potentiellement élevés. Toutefois les vins dégustés montrent que :

La fraicheur est au rendez-vous

Une fraicheur portée par des taux d’acidité corrects et une aromatique favorable. Les vins rouges auront très vraisemblablement un bon potentiel de garde. Les blancs secs se révèlent assez aromatiques car la maturité phénolique a fini par rattraper son retard début septembre pour être optimale: c’est une bonne surprise.

Les jus sont colorés

L’extraction de la couleur et des arômes ont été rapide et il y a eu par conséquent moins de soutirages. Il ne fallait pas non plus monter trop les températures de fermentation (risque d’avoir des vins un peu raides). Un millésime 2022, qui aura produit des vins riches (beaux tanins et de la couleur) et qui auront un potentiel de garde (de l’acidité).

Des vins plaisants

Les vins rouges révèlent, en général, une très légère sucrosité, sur des arômes fréquents de fruits noirs (myrtille notamment) et de violette. Cette sucrosité est le résultat d’une tendance à « faire des vins plaisants » en adéquation avec le goût du consommateur : cette sucrosité est « apportée essentiellement par les mano-protéïnes issues des peaux des levures mortes : un élevage sur lie en quelque sorte » nous dit un œnologue conseil d’ENOSENS. Un processus à suivre pour les Bordeaux tant il rend le vin séduisant sans altérer son identité liée au terroir.

Les châteaux ont dû, lors des assemblages, bien sélectionner entre les lots de cépages car les merlots et les cabernets pour les rouges mais aussi les sauvignons et les sémillons pour les blancs ne se sont pas comportés de la même manière sous une contrainte climatique forte. En outre, les techniques de vinification ont manifestement compensé le léger déséquilibre sucre/acidité.

Parmi les stands présentés on remarquera :

  • Un stand Bordeaux et Bordeaux supérieur qui présentait un Bordeaux d’entrée de gamme « bluffant » tant l’équilibre et le plaisir était au rendez-vous.
  • Les vins du Médoc se sont révélés colorés avec des tanins souvent soyeux avec un joli fruit.
  • Un Sainte croix du Mont complexe et équilibré entre sa liqueur et sa fraîcheur (Château La Rame) et un Sauternes (château d’Armajan des Ormes) complexe lui aussi, long, sur une gamme aromatique riche. Les lots de raisins passerillés et ceux des raisins botrytisés ont permis de bien jouer lors des assemblages et de réaliser des vins complexes.
  • Un stand rive droite où les satellites de Saint-Émilion (Puisseguin et Lussac) et de Pomerol (Lalande) ont tenu la dragée haute à leurs camarades des appellations-racines. Des vins surprenants et excellents, parfois préférés par certains dégustateurs.

L’impression finale est bonne. Le millésime 2022 s’en sort très bien alors que la climatologie, très contraignante, avait mis la vigne à rude épreuve. Équilibre, richesse, expression aromatique et fraîcheur sont au rendez-vous, déjouant ainsi quelques pronostics un peu pessimistes et hâtifs. Les dégustations des Primeurs devraient se situer dans cette veine. À très vite donc.