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[Champagne Tasting] Legras & Haas remet les millésimes dans le bon ordre !

Auteur

Yves
Tesson

Date

11.05.2023

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Legras & Haas ne sort pas moins de trois nouvelles éditions de cuvées cette année qu’elle présentera ce samedi à Champagne Tasting au Palais Brongniart : le blanc de blancs 2014, les Sillons 2014, et Exigence n° 11. Nous sommes allés les découvrir en avant-première au siège de la Maison à Chouilly où nous avons été accueillis par Jérôme Legras.

2014 étant une année plutôt froide et 2015 une année chaude, c’est tout naturellement qu’il y a maintenant près de 24 mois, la Maison Legras & Haas avait choisi de sortir le blanc de blancs 2015 avant le 2014. Aujourd’hui, lorsqu’on déguste le 2015, on ne peut s’empêcher de se rassurer sur la résilience du terroir face au réchauffement climatique. Des sols aussi crayeux que ceux de Chouilly (on est ici essentiellement sur le Montaigu et ses satellites Nord) offrent un réservoir de fraîcheur que même une année aussi solaire que 2015 a du mal à épuiser. Si le nez évoque d’emblée une certaine générosité sur des arômes très gourmands de tarte tatin sortie du four, l’attaque de la bouche reste marquée par la tension et la minéralité. Ce n’est qu’en fin de bouche que la douceur et la rondeur du millésime se manifestent, tandis qu’une belle amertume prolonge encore de longues minutes le souvenir du vin sur les papilles. Clairement, c’est un vin mûr qui est aujourd’hui à son apogée et qui n’a pas déçu les consommateurs. Jérôme Legras raconte : « Même si pour notre part nous avions obtenu de bonnes critiques, de manière générale 2015 est un millésime sur lequel la presse était loin d’être unanime. Mais, à la différence de 2011, le public n’a pas suivi son avis, le marché a donné tort à l’expertise. »

Le nouveau millésime 2014 dévoile un profil très différent, moins opulent, plus délicat. Le nez est floral et la bouche offre des premiers arômes de miel et de fleur d’acacia. La fraîcheur s’exprime autour de notes d’agrumes plutôt doux, on pense à la mandarine. Il y a aussi quelque chose de crémeux. « C’est un vin qui a neuf ans et qui entre dans une première fenêtre de dégustation avec beaucoup de panache. J’avoue qu’il s’agit de l’un de mes millésimes préférés. J’ai adoré 2013, et je ne pensais pas pouvoir aimer autant 2014. » (Prix : 65€)

Le Sillon 2014
Le Sillon 2014 (106€) succède lui aussi à un 2015. Cette cuvée est élaborée à partir de la parcelle « Derrière Partelaine ». « Plusieurs influences se conjuguent dans cette vigne. Il s’agit de la parcelle située la plus au Nord-Ouest de Chouilly et de la Côte des Blancs. Elle est qui plus est exposée plein Nord. Il y a aussi la rivière qui se trouve à 400 mètres si bien que, lorsque l’on a une vendange un peu tardive, c’est à cet endroit que se concentrent les premières nappes de brouillard. Tout ceci a un impact important sur l’harmonie entre la maturité alcoolique et la maturité phénolique. Alors qu’on cueille ces raisins plutôt en fin de vendanges, on a peu de sucre tout en ayant une belle maturité phénolique et une protection intéressante des acides. Ensuite, si vous regardez la carte géologique, vous vous apercevez qu’à Chouilly certaines parcelles, dont Derrière Partelaine, sont localisées sur un banc de craie plus ancien que la craie de bélemnites du Campanien que l’on trouve habituellement sur la Côte des blancs. Sa décomposition est donc plus avancée et les vins qui en sont issus ont une facilité plus grande à en extraire des sels minéraux. »

À lieu-dit atypique, vinification atypique. Au pressurage, Legras & Haas pratique une extraction moins importante pour ne pas venir associer à la grande fraîcheur de la parcelle celle d’amers qui seraient apportés par une extraction trop prononcée. « On ne fait pas une extraction en volume, mais en pression. On presse un peu moins fort et on récupère le moût qui a coulé en fin de troisième serre. Théoriquement, la cuvée correspond à 20 hectos pour 4000 kilos de raisin, mais, dans notre cas, si seulement 17 hectos ont coulé, ce sera 17 hectos. » La vinification se fait en foudre et à basse température autour de 13 degrés. « Cela révèle le potentiel aromatique des vins tout en conservant une certaine élégance. Or, cette parcelle a justement un potentiel aromatique un peu inférieur à la moyenne et peut produire des vins très austères. On arrive ainsi à équilibrer cette acidité forte et cette texture très resserrée. Ce n’est quand même pas désagréable d’avoir un peu de fruit et cela donne la possibilité de mettre des vins sur le marché qui n’ont que huit ans, alors qu’en cuve il faudrait cinq ou six ans de plus. Personnellement, je me méfie des vins trop corsetés, ces blocs de tension dont on se dit qu’il suffit de les garder en cave. Parfois, et on l’a vu en Champagne avec 1996, le supplément de générosité que l’on attend et qui doit leur permettre d’atterrir peut ne pas arriver. » Le vin reste pour autant très traçant, on part sur des notes vives de citron jaune, des arômes de pain grillé, mais on observe effectivement des notes de fruit blanc et en particulier de poire, qui lui apportent cette petite touche flatteuse et lui conservent un certain confort.

Exigence n°11
Une autre façon de tempérer la vivacité et la minéralité de Chouilly, est de la travailler en réserve perpétuelle et de la coupler avec des pinots noirs bien solaires d’Aÿ. C’est la partition que joue la cuvée Exigence, qui sort son onzième opus sur la base 2019 (70 €). Le vin est légèrement réglissé avec des fruits jaunes cuits qui évoquent la tarte à la mirabelle, il y a ici à la fois beaucoup de gourmandise et de complexité. « C’est un vin tellement facile d’accès ! L’avantage en effet de la réserve perpétuelle (débutée en 1996 !) est de faire au long cours des vins qui ont très peu d’aspérités, privilégiant la complexité, mais pas la complication. Ce n’est pas une cuvée que nous élaborons chaque année. Cela dépend de la qualité de la vendange. Nous ouvrons alors notre cuverie à une maison d’Aÿ, et nous lui échangeons des vins clairs en pinot noir qui serviront de base contre des vins clairs en chardonnay de Chouilly. Nous commercialisons en général cette cuvée pendant trois ans, en la dégorgeant trois fois, elle connaît donc une évolution. Au début, c’est un champagne dans l’évidence du fruit, mais avec un vieillissement plus long elle acquiert une patine oxydative. Exigence n° 10 présente aujourd’hui des notes de cire d’abeille mais aussi un côté marc de raisin. Une véritable communauté s’est créée autour de ce champagne, au départ tiré à 2000 bouteilles et aujourd’hui à 15.000. Le style est un peu différent du reste la gamme et n’attire pas forcément le client Legras & Haas typique ». 

Cuvées disponibles sur la boutique en ligne de la Maison : https://www.legras-et-haas.com/boutique/