Samedi 9 Novembre 2024
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30.06.2011
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Face aux méventes du vin, la Winery d’Arsac en Gironde a choisi de s’approcher autrement du consommateur. Elle a inventé le signe œnologique.
D’abord il y a un homme, Philippe Raoux, un vigneron négociant, numéro un de la vente par correspondance en France, amateur d’art, probablement esthète ascendant explorateur. Le sang familial est au négoce depuis quatre générations, sur les terres chaudes d’Algérie puis en Gironde. Les Raoux cherchent des bulles de champagne dans les déserts. L’ADN, chez eux, c’est l’innovation, façon audace. Ensuite apparaît un lieu, la Winery d’Arsac en Gironde, la première winery française inspirée des attractions touristiques de la Napa Valley californienne. Un bâtiment surprenant, de verre et d’acier, posé à l’entrée du Médoc des vignes, sur un parc de 26 hectares. 12 000 m2 ouverts à une boutique qui porte 1 500 références du monde entier, un restaurant, un bar à vin, une salle d’exposition, une autre de dégustation et des espaces aménagés pour le pique-nique. Avec 45 000 visiteurs en 2009, la Winery est devenue le premier centre œnotouristique d’Aquitaine. Un concept, enfin, lie l’homme et le lieu sur ce constat : La vente du vin ne cesse de chuter. Il faut ouvrir une nouvelle piste à la consommation, renouveler le discours, parler à cet amateur qui fait tant défaut, car il s’ignore.
La Winery d’Arsac existe pour occuper le terrain du goût et du plaisir. « Sur les marchés émergents comme la Chine, expliquent Philippe Raoux et son concepteur développeur Wilfrid Groizard, la boisson change avec l’élévation du niveau de vie. Nous proposons d’approcher tous les goûts du vin. Sur les marchés matures, la France par exemple, il faut toucher les trentenaires qui commencent à le placer chez eux au rang des outils de convivialité. Personne n’avait qualifié la préférence gustative des individus. C’est pour cela que nous avons inventé le signe œnologique. »
Cette curiosité du marketing, au pays de la souveraineté des terroirs et du langage précieux, est évidemment un clin d’œil à l’empire très incertain de l’astrologie. Le signe, pourtant, a été mis au point par Frédéric Brochet, major de l’École normale supérieure de Cachan, maître en biochimie, docteur en œnologie et auteur de la première thèse sur la dégustation. Son équipe de spécialistes de l’analyse sensorielle a étudié les préférences de 3 000 personnes, desquelles ont été extraites et définies huit familles de goût : tendance, éternel, sensuel, esthète, musclé, gourmand, explorateur et insoumis. Huit profils complétés par des ascendants, un sensuel musclé n’ayant évidemment pas de parenté avec un musclé sensuel. Le premier va s’éprendre des rouges singuliers, tels les merlots. Le second s’enflammera pour les vins du sud de la France et les grands côtes-du-rhône. Chaque candidat au profil déguste six vins à l’aveugle avant de recevoir son livre de cave personnalisé, une trentaine d’étiquettes adaptées à sa personnalité. Le signe n’est pas réduit à une territorialité. Il embrasse le monde. Vous découvrez soudain ce languedoc inconnu qui vous manquait. Vous ne saviez pas encore que vous aviez un rendez-vous intime en Bourgogne et à Sancerre. Comment avez-vous pu vivre sans ces breuvages espagnols et chiliens ?
Le succès de l’expérience à la Winery d’Arsac a poussé Philippe Raoux à lancer le signe à l’étranger. Traduit en cinq langues, il est vendu aux hôteliers, cavistes, croisiéristes, et tous ceux qui sont en contact direct avec les consommateurs. À suivre, un coffret ludique avec DVD pour les soirées tapas à la maison, qui permettra à chacun de rentrer ses réponses sur signe-œnologique.fr, afin de découvrir son moi vineux. Apprendre et se faire du bien, même quand on n’a pas les moyens de suivre les tarifs appliqués aux notes de Parker. Voilà le chemin. Le signe œnologique, c’est un ensemble de petits cailloux pour ne pas se perdre dans la grande forêt, et une façon simple et drôle d’entrer dans la majestueuse auberge des amis du vin.
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