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« Identitaires & Authentiques », la nouvelle gamme de Champagne Esterlin

Auteur

Yves
Tesson

Date

06.01.2021

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Le champagne Esterlin a récemment lancé une nouvelle gamme « Identitaires & Authentiques ». Elle complète la gamme Éclat, et traduit le repositionnement de cette coopérative atypique vers le réseau traditionnel.

Derrière la marque Esterlin se trouve l’une des coopératives les plus originales de la Champagne, celle de Mancy, située au sud d’Épernay, sur les contreforts de la Côte des Blancs. Créée en 1948, elle a connu un développement fulgurant à partir des années 1970 où elle a posé plusieurs choix audacieux. D’abord en cherchant à attirer des vignerons issus d’autres crus alentours, rompant avec le dogme qui voulait que chaque village ait sa coopérative, puis en implantant un centre de pressurage dans le Sézannais, un terroir offrant une belle complémentarité. Alors que les chardonnays de Mancy, cultivés sur des sols crayeux, brillent par leur élégance et leur austérité, ceux du Sézannais sont plus opulents et fruités.

Plus récemment, elle a créé un troisième centre de pressurage dans la vallée de la Marne, près de Dormans, à la Chapelle Monthodon, renforçant ses approvisionnements en Meunier. Enfin, elle travaille avec quinze pressoirs particuliers gérés par des vignerons sur des secteurs très éclatés (y compris dans l’Aube !), ce qui lui permet avec un domaine d’approvisionnement de taille moyenne (110 hectares) de bénéficier autant de la diversité des terroirs champenois que les plus grandes coopératives. On doit également signaler qu’elle est la seule coopérative de Champagne à être parallèlement propriétaire d’un véritable domaine viticole (7,5 hectares de vignes répartis sur Mancy et la Chapelle Monthodon et 4 hectares en fermage). Côté œnologie, dès 1972, la coopérative a initié une soléra. Hormis celle de Palmer, on en trouve peu d’aussi anciennes en Champagne. Elle a aussi décidé de bloquer les fermentations malolactiques, ce qui donne une jolie tension à ses vins, mais nécessite des gardes prolongées (le BSA repose sur une base vendanges 2014 !)

En 1994, alors que le boom de l’œnotourisme n’avait pas encore fait flamber le prix du foncier sur l’Avenue de Champagne, la coopérative y a fait construire une villa imitant le style de Palladio en Vénétie, dont l’excentricité n’a rien à envier aux demeures néoclassiques bâties au XIXe siècle par les négociants.

Côté commercial, dans les années 1980, la coopérative de Mancy s’est d’abord orientée vers la grande distribution : « à l’époque, tout le monde se battait pour y aller… Il n’y avait pas autant de cavistes et on y trouvait beaucoup de produits du terroir. » Le champagne Esterlin dépasse alors le million de bouteilles, ce qui l’a conduit à se doter d’un outil de production très perfectionné, certifié Iso 22.000 (sécurité alimentaire) et Iso 14001 (recyclage, traitement des déchets…).

Aujourd’hui, la marque a opéré un repositionnement sur le secteur traditionnel (Cavistes et CHR), qu’elle a confié à Frank Lesterlin (photo ci-dessous-, un fin connaisseur de la Champagne, passé par Laurent-Perrier, LVMH, Duval-Leroy… En trois ans, celui-ci a constitué presque ex-nihilo un réseau d’agents : « ils ont tous des beaux portefeuilles, mais les marques de champagne avec lesquelles ils travaillent se situent à des niveaux de prix qui les obligent à renoncer à certains marchés comme les ventes à la coupe. Esterlin se trouve à un prix médian tout en étant un vrai champagne sur lequel il y a matière à parler vin… »

Évidemment, il est impératif d’aider les vignerons à répondre aux attentes de ce marché plus exigeant, en particulier sur les questions environnementales, ce qui nécessite un accompagnement technique et administratif pointu. « Nous encourageons la certification Viticulture durable en Champagne, parce qu’elle est plus ambitieuse sur le plan viticole, et HVE, parce que c’est un label davantage connu à l’extérieur ». La coopérative a en effet rapidement compris que le champ d’action d’une coopérative ne pouvait plus se limiter à la mise en commun d’un outil de production, mais qu’elle devait aussi proposer du conseil, d’où la création de la société Access. Aujourd’hui, près de 40% des adhérents sont certifiés.

Une nouvelle gamme au dosage savamment étudié

Ce repositionnement s’est traduit par la sortie d’une nouvelle gamme « Identitaires & Authentiques » en 2020, qui vient compléter la gamme Éclat avec des champagnes plus faiblement dosés. Il y a d’abord le Blanc de Blancs 2013 Extra Brut (3,8 g). « Pour débuter une dégustation, c’est le top, parce que c’est un vin très tendu, qui réveille les papilles, avec des notes d’agrumes affirmées. Il y a aussi un effet millésime. 2013, c’est ce qu’on pourrait appeler un millésime intermédiaire. Son PH un peu plus bas que 2012 lui a permis d’arriver plus vite à maturité, alors que 2012 peut encore attendre. Et en même temps, on n’a pas le côté consensuel du 2015, plus rond et moelleux. »

Avec Ex-Soléra (du latin « à partir de »), Esterlin présente un champagne où la proportion de réserve perpétuelle atteint 40%, offrant juste ce qu’il faut de notes épicées, avec des arômes séduisants de noisette et d’hydromel en fin de bouche.

Le Pur Meunier Extra Brut répond au nouvel engouement pour celui qui fut longtemps un parent pauvre du vignoble. « Quand je suis arrivé en Champagne, c’était le cépage qui faisait le compte ». Pourtant, comment ne pas succomber à ses arômes étonnants de fruits rouges qui viennent « en toute fin de bouche, en rétro-olfaction » ? Ce champagne charmeur, constitué à partir d’une parcelle du coteau de Saint-Agnan dans la Vallée de la Marne et de deux parcelles de la vallée du Surmelin, a été directement assemblé sur le pressoir.

Pour conclure cette gamme, Esterlin propose un brut nature (42% Chardonnay, 38% Meunier, 10% Pinot noir) dont le millésime, 2009, ne doit rien au hasard : une année solaire avec des raisins déjà très riches en sucre… « Cette sucrosité naturelle a même confondu un client de l’un de nos cavistes parisiens, persuadé qu’on le trompait et que le vin était dosé ! » On est ici sur des fruits confits, des arômes fumés, des notes de cire de miel et d’amande. Cette cuvée qui a évolué vers les arômes tertiaires, accompagnerait à merveille une poularde avec une crème aux champignons, c’est de toute évidence un champagne de table ! « Nous l’avons lancée en avant-première à Épernay pendant l’été 2019, en dépit de son prix, c’était notre deuxième vente en volume juste derrière le BSA ! »

www.champagne-esterlin.com