Accueil Krug : l’ode au vieillissement

Auteur

Jean-Michel
Brouard

Date

04.11.2019

Partager

La prestigieuse maison champenoise produit, année après année, des cuvées haut-de-gamme d’une très grande régularité. Et si ici les vins naissent patiemment, ce n’est que pour mieux leur préparer à une longue vie à laquelle ils sont promis.

Depuis la fondation de la maison par Joseph Krug en 1843, une même philosophie participe à la création des vins. « Proposer un champagne de qualité indiscutable », voilà l’engagement permanent qui anime toutes les équipes. Et s’il y a peu d’intervention en cave au moment de la vinification, c’est que tout se joue principalement au vignoble. Julie Cavil, Directrice de l’œnologie en interne, rappelle ainsi la volonté « d’avoir la palette la plus contrastée de vins possible pour faire [leur] assemblage ». Loin de lisser les vins produits par les vignerons partenaires, Krug les encourage à « cultiver leurs différences ». Ainsi, chaque année, au moment de réaliser la Grande Cuvée et éventuellement une cuvée millésimée, il est possible aux équipes de choisir parmi un large éventail de possibilités. Ce fut le cas bien évidemment en 2006 dont la cuvée millésimée vient d’être mise sur le marché. A cette occasion, la maison propose un extraordinaire coffret, « les créations de 2006 ». L’idée est de pouvoir mettre en parallèle deux expressions du style Krug produites en 2006. D’un côté la grande Cuvée 162ème édition et de l’autre le millésimé 2006.

Le début d’une longue vie

L’année 2006 fut une année particulièrement contrastée en Champagne. A une période de sécheresse et de chaleur très importantes succéda une très grande pluviométrie associée à une forte baisse des températures. Mais la fin d’été apporta des conditions optimales et permit de donner naissance à un millésime. N’allez pas croire que cela soit systématique chez Krug. Il faut que l’année ait quelque chose à raconter. Parfois, les vins ont beau être bons, ce n’est suffisant. Point de millésime 2009 ou 2012 par exemple. Mais en 2006, ce fut différent. La très grande puissance aromatique et le côté solaire des vins dénotaient une personnalité à part. Après 12 années de vieillissement, voici donc cette cuvée proposée aux amateurs (pour mémoire, aucun champagne ne quitte les caves avant 7 ans, bien plus pour les millésimés). Discret au premier nez, il lui faut du temps pour s’exprimer. Mais les minutes passant, le vin offre une grande générosité. D’abord aromatique. Citron confit, noisettes torréfiées, notes grillées et florales. Le vin tapisse la bouche de son fruité mûr. Il est toutefois porté par une fine trame acide qui lui donne de l’allant et énergise la finale. Un vin avec beaucoup d’ampleur qui impose son univers. Délicieux aujourd’hui mais encore totalement en devenir. En comparaison, la Grande Cuvée produite cette même année 2006 et sortie avant sur le marché paraît plus immédiatement accessible et charmeuse. Contrairement à sa cuvée sœur millésimée, elle est le fruit d’un assemblage. Au vin de base de 2006 sont venus se mêler 142 vins de 11 années différentes, certains datant même de la vendange 1990. Eh bien, quelle fraîcheur ! Le vin est d’une grande droiture, parfaitement frais grâce aux vins de réserve. Quelques années après sa présentation, le vin se patine parfaitement et se bonifie. Aromatiquement de plus en plus complexe, sa structure lui promet un vieillissement très harmonieux pendant encore de très longues années. Millésimé ou pas, preuve une fois de plus que Krug ne fait aucun compromis. Les vins produits ont un équilibre magnifique et une aptitude impressionnante à traverser le temps.