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Les Vignerons Ardéchois s’embarquent dans Terra Noë

Auteur

Frédérique
Hermine

Date

23.09.2019

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L’union coopérative ardéchoise a fait ses premières vendanges au domaine Terra Noë, 25 ha qu’elle vient de racheter dans les coteaux près de Vogüé grâce à un financement participatif.

« Quand on représente 90% des vins ardéchois, on se doit d’innover sur tous les sujets et d’avoir un lieu emblématique qui nous représente » annonce en préambule Philippe Dry, le directeur des Vignerons Ardéchois, union d’une douzaine de coopératives regroupant un millier d’adhérents (dont une cinquantaine de viticulteurs à plein temps). Le gigantesque site de production et d’embouteillage de Ruoms ne fait guère rêver. L’Union se met donc en quête d’un lieu qui sera la vitrine de ses vignerons. Ce sera à Rochecolombe près de Vogüé, classé parmi l’un des plus beaux villages de France, au bord du parc régional des Monts d’Ardèche et au cœur des gorges de l’Ardèche entre les coteaux, à la limite de la garrigue. La propriété de Claude Gascon créé par son père Casimir est d’un seul tenant, une rareté dans un vignoble très morcelé. 25 ha avec des vignes à perte de vue, plutôt bien entretenues mais en viticulture conventionnelle. « A mon arrivée il y a quatre ans autour de Vogüé, j’avais déjà été émerveillé par la quiétude de l’endroit. Nous allons en faire une vitrine bio – plus facile sans voisins- et commencer a faire tomber les rendements de moitié dans un vignoble planté surtout en grenache, syrah, cabernet sauvignon pour les rouges (avec une parcelle de merlot), en viognier et chardonnay pour les blancs ». Le domaine a été baptisé Terra Noé pour en faire un navire amiral dans un océan de vignes et y faire renaître la biodiversité (tel Noé qui était aussi agriculteur rappelle Philippe Dry).

Ci-dessous : François Guigon et Philippe Dry

La création en 2018 d’une SCIC (Société Coopérative d’Intérêt Collectif), Ardèche Vignobles, qui a permis cette acquisition, se veut aussi le symbole d’une autre gestion en financement participatif. Elle compte 500 sociétaires, essentiellement des particuliers amoureux de la région par la famille ou les amis et qui ont pris des parts à 1000€ pour soutenir le projet d’installation de jeunes vignerons. 120 d’entre eux ont d’ailleurs participé aux premières vendanges du viognier il y a quelques jours. Leur investissement (défiscalisé à 18%) leur rapportent chaque année 5% en vins. Et ils peuvent participer à des événements spécifiques à la cave ou à la vigne « pour comprendre ce qu’il y a dans la bouteille ». L’objectif des Vignerons Ardéchois est de devenir des facilitateurs pour installer les jeunes (les deux tiers des adhérents ont plus de 65 ans) et de freiner l’hémorragie des coopérateurs. « Il y a dix ans, on travaillait 7500 à 8000 ha, aujourd’hui 6000 et si on ne fait rien on risque d’en perdre 500 ha d’ici 5 ans. Nous nous attachions donc à trouver des candidats ». Une demi-douzaine se sont donc déjà vus confier des vignes à Pradon et Mirabel.

La SCIC a d’ores et déjà pu acquérir une soixantaine d’hectares dont les 25 de Terra Noé confié à Raphaël Deborne, spécialiste du bio qui a lancé d’emblée la conversion. Le domaine sortira au printemps 2020 une cuvée dans les trois couleurs (un chardonnay-viognier blanc, un syrah-grenache rosé et un syrah-grenache-cabernet rouge) en sélections parcellaires avant de réfléchir à deux cuvées blanc et rouge élevées en barriques. Le domaine est accompagné pour la partie viti-œno par l’œnologue bordelaise Valérie Lavigne qui s’est déjà penché sur l’achat de nouvelles cuves et de demi-muids « La cuverie en ciment sera conservée pour les rouges et le stockage, et on déjà acheté des tracteurs pour le bio », détaille Philippe Dry. De gros travaux sont à prévoir à commencer par le chai et le caveau l’an prochain sur un concept inédit. Terra Noë conservera les murs du corps de ferme du 19ème en pierres blanches (gravettes) et noires du Coiron (basalte) qui seront restaurés en accord avec les Bâtiments de France. « Le domaine restera ainsi dans son jus ardéchois, cela va de soi » conclut Philippe Dry. Un projet œnotouristique est également en réflexion. Une convention a été signée cet été avec la LPO (Ligue de Protection des Oiseaux) pour que Terra Noé devienne un site refuge – 37 espèces de papillons y ont déjà été recensés. Le prolongement naturel de la démarche Ardèche par Nature initiée en 2016 par la coopérative dans le but de basculer tout son vignoble en HVE d’ici 2025.

Ci-dessous : Raphaël Deborne