Accueil Un été en musique dans le vignoble

Auteur

La
rédaction

Date

26.07.2012

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Le grand air, de grands vins et des grands artistes de renommée mondiale attirent les foules vers le vignoble bordelais, qui accueille un nombre croissant de concerts d’été de jazz ou de musique classique.

« C’est tendance, et ça marche. Cela attire un public qui n’est pas le public traditionnel des amateurs de jazz », déclare le pianiste François Faure alors qu’il descend de la scène du Saint-Emilion Jazz Festival (qui s’est tenu du 19 au 22 juillet). « Ils sont amateurs de jazz mais avant tout de vin »… et viennent déguster la musique et la région viticole tout autant que le vin.

L’un des organisateurs de l’événement (Bordeaux et sa région en comptent une bonne demi-douzaine de la même veine durant l’été) s’est tourné vers les festivals après avoir pris sa retraite de négociant en vin. « La beauté du village m’a attiré, et j’ai trouvé fantastique l’idée d’une rencontre avec la musique », déclare Dominique Renard. « Nous parlons d’assemblages de vin et de variétés de cépage ; eh bien ici, nous avons le village, le vin et la musique – ce sont nos trois composants de cet assemblage. »

Des contacts noués tout au long d’une carrière dans le vin ont aidé à lancer de nouveaux festivals. Quand M. Renard a amorcé ses événements sur financement privé, il s’est tourné vers les vignerons locaux et deux amis de longue date. Le premier est le célèbre producteur de musique Tommy LiPuma, un amateur de vin dont il est devenu l’ami, il y a longtemps, lors d’un déjeuner dans un château bordelais. « Je suis un collectionneur de vin, mais uniquement en vue de le boire », dit LiPuma.

Robert Parker, le critique de vin mondialement connu, est le second ami célèbre qui lui accorde son soutien. « J’aime la musique, et bien sûr, j’aime Bordeaux, souligne Parker. Dominique Renard est un cher, cher ami. Il m’a demandé : veux-tu venir en tant que parrain du vin ? J’ai dit, absolument. Je n’étais pas venu à Bordeaux en été depuis les années 70. »

Le critique a noté qu’alors que les vins de Bordeaux sont vus comme ayant considérablement progressé dans leur ensemble ces trente dernières années, la ville brille aussi par la rénovation radicale de son centre historique. « Ma femme n’était pas revenue ici depuis 1986. Je dois l’emmener sur les quais de Bordeaux pour lui montrer ce que le maire, Alain Juppé, a réalisé. C’est extraordinaire. C’est l’une des plus belles villes de France maintenant » déclare Parker.

Renaissance

Ces enchaînements de concerts dans les vignobles font partie de cette renaissance bordelaise, et dans quelques cas, les événements n’auraient pu avoir lieu sans elle.

Quand le Jazz and Wine Festival a eu besoin d’un lieu en plein air pour accueillir Herbie Hancock au début du mois, ils ont fini par avoir 2 000 personnes sur la place bordelaise du XVème siècle de Pey Berland, qui a bénéficié d’un ravalement de plusieurs millions d’euros en 2004, créant une spacieuse zone piétonne.

A l’opposé de la place Pey Berland, la plupart des lieux d’accueil pour ces événements favorisent une atmosphère intime. Ainsi, pour le concert en soirée à Saint-Emilion, les rythmes hypnotiques des percussions des artistes de Hakouk Trio ont filtré à travers les vignes depuis une petite scène ouverte dans les douves du village médiéval. « Le cadre est exceptionnel, dit le pianiste François Faure. C’est tout à fait différent des sites habituels. »

« Nos concerts sont pratiquement des concerts privés, confie Dominique Renard. Ils sont petits, à la taille des villages et nous essayons d’obtenir une haute qualité, comme dans nos vins. »

Beaucoup de lieux de concert ont un rapport étroit avec le vin. Quand le Château Pichon-Longueville a accepté d’accueillir René Barbera, un excellent jeune ténor, dans le cadre de la série de concerts des Estivales de Musique de Médoc le 12 juillet, ils ont réalisé qu’il n’y avait qu’un seul lieu convenable pour 300 invités, en termes de taille et d’acoustique : le chai à barriques. « Pour accueillir le concert, nous avons dû enlever les deux-tiers de nos barriques, ce qui bien sûr est un long et minutieux travail, souligne Marie-Louise Schyler, directrice de la communication chez Pichon-Longueville. Mais le concert était fantastique, l’acoustique superbe, et c’était un grand moment. »

Le ténor originaire de Chicago a déclaré pour sa part qu’il avait trouvé le public de la région « formidable, très réceptif — et le cadre stimulant. J’ai dormi au château et me suis réveillé avec la vue sur le vignoble et les parfums d’air frais – et de vin ».

Suzanne Mustacich
Photo : Saint-Emilion Jazz Festival