Vendredi 10 Octobre 2025
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09.10.2025
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Figure incontournable des vins du Sud-Ouest, Alain Brumont a été l’artisan majeur, depuis plus de quarante ans, du rayonnement de l’appellation Madiran. Sa foi inaltérable dans ses terroirs gascons et dans la capacité du cépage tannat à traverser le temps avec grâce lui a permis de mesurer ses vins aux plus prestigieuses étiquettes internationales. Une quête d’excellence aujourd’hui poursuivie avec talent par son beau-fils Antoine Veiry. Illustration en huit millésimes.
Premier millésime d’Alain Brumont à la tête de Montus, propriété dont les racines remontent au XVIIIe siècle (il prendra plus tard les rênes de sa propriété familiale de Bouscassé). Alain démarre avec 8 hectares, soit une production de 48 000 bouteilles. Ce 1982 est donc un morceau d’histoire, avec son nez mentholé et sanguin, où se distinguent le cuir et une touche d’humus. Son arête acide dynamise un jus souple, poivré, légèrement délié à l’attaque, mais doté d’une sucrosité rémanente en milieu et fin de bouche. Les tanins ont une rugosité de tweed. Ce quadragénaire a encore de la gnaque.
92/100
Grand millésime et première année où Alain Brumont vend 100 % de la production en primeurs. Il lance aussi sa cuvée Prestige qui va battre de grands vins du monde à l’aveugle… Nez concentré, plein, finement confit, sur le coulis de prune et la cerise à l’eau-de-vie. Légère note viandée, du bâton de réglisse, boîte à cigares, touche d’âtre. Bouche droite, ajustée, le jus élancé et franc est porté par une belle acidité, des tanins fondus. Beaucoup de fraîcheur et de finesse dans la définition de la matière, de la mâche, de l’allonge, de la salivation, avec une persistance très désaltérante.
93/100
Une année marquée par des travaux de modernisation des installations techniques. On réduit les rendements, on adapte le nombre de grappes par pied au millésime, les vins gagnent en texture. Un 1989 au parfum capiteux et sensuel. Cuir, mûre et musc, touche de figue sèche, entre fougue et sanguinité. La bouche est construite autour d’une architecture tannique encore très articulée. Le jus est plein, dense, il a des épaules et de la percussion, signée par une aromatique brune, savoureuse, assez sauvage. La finale est légèrement acidulée, sur un jus de cerise fraîche, ponctuée d’une note de poivre vert.
93/100
Les années 1990 représentent une décennie de transition à Montus, qui s’illustre à travers ces deux millésimes. 1995 s’avère concentré, encore serti d’un élevage marqué qui confère une touche d’austérité à sa matière musculeuse, signée par la datte et l’encre de Chine. 1999 voit la propriété atteindre son parcellaire actuel (37 hectares, dont 25 pour le rouge). Le vin est plongeant et vertical, il jaillit du verre avec beaucoup d’énergie et d’élégance, du floral, de l’encens, de l’eucalyptus, de légères notes anisées, de l’écorce d’orange. Bouche tonique, zestée, la chair gainée s’articule sur une belle colonne acide, s’étirant en longueur avec une finale juteuse et salivante.
94/100
Nez concentré de tabac brun, notes fumées, lardées, ce 2005 a du fond, du caractère. Il s’annonce droit dans ses bottes : classique, dans le bon sens du terme. C’est vraiment l’affirmation du style Montus tel qu’on le connaît désormais depuis vingt ans, taillé pour la garde. Le jus se montre séveux, porté par un grain de tanins roulant, un agréable gras dans la matière, une architecture qui garantit l’équilibre entre la densité de la chair et la fermeté de la structure. On retrouve ce soutien frais, réglissé et mentholé qui est la signature de la maison, jusqu’à la finale acidulée.
94/100
Millésime référence. Robe d’un grenat profond, magnifique de densité. Quel nez ! Concentré, plein, riche, finement chocolaté, un océan calme et sombre, le tannat déroule sa majesté atramentaire. On gagne aussi en netteté aromatique, en précision. La bouche est veloutée, dotée d’un superbe crémeux : de l’intensité dans la matière, des tanins parfaitement intégrés, qui s’insèrent dans la chair et apportent de la relance, de la vibration. Cacao et cristaux de sel sur la langue. La fraîcheur est persistante, avec une touche de graphite en finale qui donne un supplément de caractère au vin.
96/100
Aromatique intense, fraîche, jaillissante. Fraise confiturée, cerise noire et mûre, on discerne un panier de fruits très expressif. Légère touche lactée, sur la crème de baie noire, une pointe de liqueur de cassis. La bouche est précise, tonique, juteuse, escortée de tanins à grain fin, dotée d’une très belle souplesse dans la matière. On aime ce jus plein d’énergie, au caractère gourmand et digeste, soutenu par une belle volupté entêtante. C’est un millésime savoureux, très revigorant et plein de sève en finale, légèrement resserré par la trame tannique. Beau potentiel de garde.
95/100
Deuxième millésime d’Antoine Veiry, arrivé officiellement en 2018. Moins d’extraction, des élevages plus longs (un an en barrique, deux ans en foudre). De l’éclat, de la netteté, un profil plongeant, complexe, profond. Une aromatique envoûtante et étendue, entre cassis, crème de mûre, tabac blond, violette. La bouche est superbe d’allure, dynamique, juteuse, campée sur un superbe soutien acide, des tanins intégrés, robustes mais cousus dans la matière. C’est un vin riche mais galbé, aux lignes épurées qui viennent dompter sa puissance naturelle. Il s’avère savoureux d’un bout à l’autre, plein de mâche et d’allonge.
96/10
1982, 1985, 1989, 1995, 1999, 2005 : 240 € la caisse de 6 bouteilles
2010, 2016, 2019 : 180 € la caisse de 6 bouteilles
Cet article est issu du magazine « Terre de Vins » n°103-104, « Vignerons des îles », paru en janvier 2025.
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