Accueil [Grands Jours de Bourgogne] Le Mâconnais en majesté

Auteur

Mathieu
Doumenge

Date

15.03.2018

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La troisième journée des Grands Jours de Bourgogne, rendez-vous des professionnels se déroulant tous les deux ans en terres bourguignonnes, était majoritairement consacrée aux vins du Mâconnais. L’affluence des acheteurs, en grande partie internationaux, était un bon indicateur de la cote d’amour de ces blancs à la qualité montante et aux prix encore doux.

« Symphonie mâconnaise », titrait le programme des Grands Jours de Bourgogne pour cette troisième journée qui se déroulait – exceptionnellement – non pas au cœur du vignoble mais dans l’enceinte du Palais des Congrès de Beaune. Pas forcément le plus romantique des décors, mais peut-être le plus approprié pour permettre aux nombreux professionnels venus du monde entier (nous y reviendrons) d’appréhender toute la diversité des vins de cette Bourgogne méridionale qui ne cesse de séduire. Ses arguments ? Des terroirs de toute beauté, une jolie mosaïque de styles, et des prix qui n’ont pas encore eu l’idée de torpiller la stratosphère. Pas étonnant que les acheteurs redoublent de curiosité au moment de les déguster. Les journalistes aussi…

Pouilly-Fuissé, Pouilly-Vinzelles, Pouilly-Loché, Saint-Véran, Viré-Clessé, Mâcon, Mâcon Villages… Ici les blancs règnent. Ils peuvent arborer le tranchant d’une lame de couteau, une minéralité toute kimméridgienne ou l’opulence beurrée d’un chardonnay de sénateur, mais ils ne laissent pas indifférents. Ils savent, parfois, jouer les francs-tireurs, à l’image de Viré-Clessé qui attend patiemment que le ministère de l’Agriculture entérine son projet de segmentation des blancs entre secs, demi-secs (4 à 8 g de sucre résiduel) ou « levroutés » (jusqu’à 18 g de résiduel). Ils sont, toujours, une des plus pures expressions de ce que la France peut produire en grands blancs.

Difficile de trier, parmi toutes les cuvées dégustées, celles qui nous ont le plus ravis. Nous avons essayé de nous plier à l’exercice pour vous livrer nos coups de cœur du jour.

Les choix de Laurent Gotti

Domaine Giroux et fils
Pouilly-Fuissé « Les Raidillons » 2015

Avant de rejoindre l’exploitation familiale, Sébastien Giroux a travaillé dans le sport automobile. Il a réalisé des stages, notamment chez les frères Bret, pour finalement travailler les vignes tenues jusqu’alors par son père Yves : 6,5 hectares sur les appellations pouilly-loché, pouilly-fuissé et mâcon-fuissé. Plusieurs parcelles, bien pentues (Les Raidillons n’est pas un Climat), donnent naissance à cette cuvée puissante et expressive sur des notes de fruits jaunes à maturité. L’ensemble ne manque pas pour autant de finesse.

Delphine et Sébastien Boisseau
Mâcon Bray 2016 – « 116 »

116 comme l’âge des vignes du Clos Rebetiot sur la commune de Bray (près de Cluny). Un superbe vignoble travaillé en bio ce couple de jeunes vignerons. Sébastien et Delphine Boisseau étaient vignerons coopérateurs avant de choisir d’écrire leur destin. Ce « simple » mâcon présente une magnifique densité, de la rondeur et de la gourmandise. Un grand vin de plaisir.

Frantz Chagnoleau
Pouilly-Fuissé « Pastoral » 2016

Jeune œnologue, passionné par le vin et originaire de Charente-Maritime Frantz Chagnoleau est tombé amoureux du Mâconnais. Il a créé un domaine en 2009. Depuis le talent du vigneron couplé aux terroirs de ce vignoble font des étincelles. A l’image de ce Pouilly-Fuissé d’une grande harmonie, d’une superbe longueur, le tout accompagné par un boisé parfaitement intégré.

Les choix de Mathieu Doumenge

Domaine des Crêts
Mâcon-Chardonnay « En Bout » 2016

François Lequin, vigneron à Santenay, et Matthieu Ponson, néo-vigneron à… Beaumes de Venise (Domaine de Piéblanc), sont deux amis. En 2014, ils ont fait le pari de reprendre 4 hectares dans le Mâconnais, qu’ils convertissent en bio (certification attendue en 2019). Ils en confient les rênes à Mehdy Ali-Boukhalfa, qui a roulé sa bosse dans la région. Le résultat : des blancs purs, digestes, équilibrés, à l’image de cette cuvée qui marie une jolie richesse dans la matière et un profil long, salin. Vinification en fûts de 500 litres (seulement 10% de bois neuf), douze mois d’élevage et encore 3-4 mois en cuve avant la mise. Moins de 16 € à la propriété.

Domaine Saumaize-Michelin
Pouilly-Fuissé « Clos » Sur La Roche 2016

Quinze cuvées sur 10 hectares de vignes, il faut suivre. Dans ce vignoble familial, on aime aller dans le détail. Vivien, qui a rejoint ses parents il y a six ans, amorce la transition en douceur et perpétue le style maison, élégance et race. On aurait pu craquer pour La Maréchaude, ample, charnue, sensuelle, mais c’est la silhouette élancée et athlétique du « Clos » Sur La Roche qui nous a séduit. Ce futur Premier Cru produit un vin aiguisé, tonique, félin, qui se déploie en bouche avec une belle énergie. Séduction garantie, à environ 23,50 €.

Domaine de la Verpaille
Viré-Clessé Virolis 2016

Les vins de Viré-Clessé décontenancent le dégustateur. On voudrait aller vers toujours plus de rectitude, de tension, on voudrait atteindre l’épure, et voici ces blancs tendres, presque douillets – « un édredon » pourrait-on murmurer. Dans la même famille depuis cinq générations mais autrefois dévolu à fournir la cave coopérative, le domaine de la Verpaille a été progressivement repris par Baptiste et Estelle Philippe, qui ont converti ses 20 hectares en bio. Ici on assume le côté pulpeux et même le léger sucre résiduel des blancs, tout en cherchant la fraicheur, la tension. Question d’équilibre. Née sur un terroir calcaire et frais, cette cuvée élevée en demi-muids associe gourmandise et minéralité, elle est juteuse, salivante, complexe. A 17 € c’est un poème.