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L’aligoté, le retour du mal aimé

Auteur

Frédérique
Hermine

Date

20.11.2015

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On le noyait autrefois dans la crème de cassis pour en faire du kir ; l’aligoté donne désormais de jolis vins frais d’un excellent rapport qualité-prix, à (re)découvrir.

Comme chacun sait, l’enfer est pavé de bonnes intentions. En croyant sauver l’aligoté il y a plus d’un demi-siècle par un mariage de raison avec la crème de cassis, le chanoine Kir, député de Dijon, l’a condamné à une image de petit vin imbuvable tout seul. Au regard des rendements pratiqués à une époque plus productiviste qu’aujourd’hui, il n’avait pas complètement tort non plus. A plus de 100 hl/ha, l’aligoté développe une acidité indéniable et pour le moins violente au palais. Mais les temps ont changé et « à 50-70 hl/ha, récolté à maturité, ce cépage peut faire de bons vins frais et gourmands » affirme Sylvain Martinand, l’œnologue des caves de Bailly-Lapierre. D’où le regain d’intérêt ces dernières années pour ce croisement de gouais blanc et de pinot noir, lointain cousin du chardonnay qui l’a remplacé après le phylloxera.

La reconnaissance par le Bouzeron

Sur 2000 ha plantés en France, 1800 sont en Bourgogne où il représente 7% de l’encépagement. Il est d’ailleurs présent dans la région depuis le 17e siècle. On l’appelait le griset blanc ou le beaunois à Beaune, le giboulot blanc dans le Châlonnais, le troyen blanc dans l’Aube… Et il portait autrefois le nom du village de production.

L’aligoté, qui peut être produit dans toute la Bourgogne (environ 14 millions de bouteilles par an), ne se retrouve désormais que dans quelques appellations bourguignonnes : le Bourgogne-Aligoté bien sûr, les jeunes Coteaux bourguignons, le Crémant de Bourgogne (où il a été de plus en plus remplacé par le chardonnay) et l’AOC Village Bouzeron qui a incontestablement redoré le blason de ce cépage mal aimé. L’appellation, née en 1997 et exclusivement à base d’aligoté, a été portée par un certain Aubert de Villaine, co-gérant de la Romanée Conti mais également propriétaire depuis 1971 d’un domaine dans l’appellation. Il existe même un premier cru uniquement élaboré à base d’aligoté, le Morey Saint Denis Clos des Monts Luisants de Laurent Ponsot.

Un formidable rapport qualité/prix

« C’est surtout un vin de plaisir, vif et peu alcoolisé, à boire légèrement rafraîchi l’été et surtout d’un formidable qualité/prix » (en moyenne entre 5 et 10 €), précise Véronique Drouhin de la maison éponyme. L´aligoté, plus incisif dans l’Yonne, plus solaire dans le Mâconnais, en général élevé en cuves mais parfois en fûts de chêne (chez Jadot, Boisset..), développe des arômes de fleurs blanches et de fruits à chair blanche, de citron, tilleul et acacia, souvent sur des notes salines et iodées.

« Il a une bouche franche et une belle longueur qui lui permet de s’adapter à des plats contemporains comme des carpaccios, la cuisine fusion, des préparations aux légumes… Et il y en a pour toutes les bourses, entre 17 et 100 € a la carte » commente Franck-Emmanuel Mondésir, sommelier du restaurant les Climats (75). A (re)découvrir nature donc lors d’un apéritif en terrasse, sur des huitres, des fruits de mer, des poissons, des crustacés, des viandes blanches, une omelette aux champignons ou un chèvre sec.

Notre sélection :

Bourgogne aligoté 2011 Domaine Chevalier Père & fils (7 €)
Bourgogne aligoté 2014 Domaine Bersan (7, 50 €)
Bourgogne aligoté 2013 Jean-Christophe Perraud (8 €)
Bourgogne aligoté 2014 Joseph Drouhin (9, 30 €)
Bourgogne aligoté 2014 Albert Bichot (12 €)
Bouzeron 2013 Domaine Chanzy Clos de la Fortune Monopole (14 €)
Bouzeron 2013 domaine A et P de Villaine (bio) (19 €)