Accueil Actualités Château Le Prieuré : le cuvier de la précision

Château Le Prieuré : le cuvier de la précision

Château Le Prieuré, Saint-Emilion ©DR

Auteur

Julia
Bouchet

Date

14.07.2025

Partager

À Saint-Émilion, le Grand Cru Classé Château Le Prieuré, propriété du groupe d'assurance Suravenir (filiale du groupe Crédit Mutuel Arkéa), s’offre un nouveau cuvier, conçu comme un outil de haute couture au service du terroir. Une architecture sobre mais pensée jusqu’au dernier millimètre, une vinification maîtrisée à la parcelle près, et un ancrage dans une "écriture technique" partagée avec les autres propriétés du groupe : Château Capbern, Château Calon Ségur, troisième Grand Cru Classé en 1855 à Saint-Estèphe et Château Vray Croix de Gay à Pomerol.

Le Prieuré ne porte pas ce nom par hasard. Son histoire commence au XIIe siècle, autour d’une église et d’un prieuré, aujourd’hui disparus. « Ce sont les moines de l’ordre de Saint-Augustin qui ont commencé à travailler ces sols. Dès l’origine, la vocation du lieu était double : spirituelle et agricole », raconte Vincent Millet, gérant du château Le Prieuré. « On est sur un site classé, inscrit au patrimoine mondial de l’Unesco, sur l'une des plus belles parties du plateau calcaire. Il y a ici une tension, une fraîcheur, une verticalité naturelles qui s’expriment dans les vins ».

©DR

Un terroir de plateau

Le Prieuré est un clos d’un seul tenant, situé donc en haut du plateau de Saint-Émilion. Le sol, très homogène, repose sur du calcaire à astéries, typique du cœur de l’appellation. « C’est un terroir qui donne des merlots très fins, presque bourguignons dans l’expression, avec une salinité naturelle, une fraîcheur structurelle », détaille Lisa Gustafsson, responsable des vignobles du groupe. Suite au rachat par Suravenir, plusieurs extensions de surface ont été réalisées, dont le rachat du château Malineau (ancienne propriété de la famille Gouze), situé dans le prolongement de Troplong-Mondot. Cet îlot de 4,5 hectares offre une double exposition sud et nord-est, apportant fraîcheur et équilibre aux vins. Une autre parcelle en contrebas, issue de Villemaurine, complète l’ensemble de 12 hectares avec un terroir plus frais. « Le vignoble se compose de 26 parcelles cadastrales, avec 19 profils de sols identifiés, notamment calcaires, argileux, ou polybiotiques. Le plateau calcaire restitue bien l’eau ; les différences de sol permettent des expressions variées des vins.» L’enjeu, pour les équipes, était d’affiner la lecture parcellaire, afin de magnifier cette matière première exceptionnelle. Ce sera le rôle du nouveau cuvier.

Un cuvier pensé comme un outil, pas un décor

Dès l’entrée dans le bâtiment, le ton est donné. « Ce lieu est uniquement dédié à l’outil de travail. Lorsqu'on a fait les plans, on n'avait pas un centimètre de plus pour faire autre chose », précise Vincent Millet. Loin des effets de manche ou de l’architecture ostentatoire, le nouveau cuvier du Prieuré revendique sa sobriété. Il s’inscrit dans une logique de fonctionnalité maximale, avec une ambition : révéler au mieux les nuances du terroir.

Nouveau cuvier mis en service pour le millésime 2024 - Château Le Prieuré ©DR

Une signature par la gravité

Vincent Millet détaille les choix techniques : « Nous avons conçu un cuvier en inox avec des cuves thermo-régulées et isolées, pour maîtriser tous les process. Nous avons 22 compartiments de cuves (doubles et simples) pour pouvoir coller au plus près au travail parcellaire mené dans les vignes ». Cette découpe millimétrée permet d’envisager les assemblages avec plus de finesse, d’explorer textures et équilibres. Le process s’inscrit dans une logique gravitaire, déjà éprouvée à Calon Ségur et Capbern à Saint-Estèphe. « On vient monter les cuvons électriques sur la plateforme, on pèse la vendange, puis on remplit les cuves naturellement. Aucun pompage. C’est la gravité qui fait le travail », poursuit-il.

Cuvier du château Le Prieuré ©DR

Une vinification de dentellière

La vinification s’effectue dans une approche volontairement peu interventionniste : « On fait des préfermentations à froid, pour garder toute la fraîcheur de nos terroirs de merlots. Très peu d’interventions, pas de délestage, rien. On cherche à préserver au maximum la structure et la finesse », explique Vincent Millet. L’élevage, lui, reste fidèle à la tradition bordelaise haut de gamme : 100% barriques, 18 mois. « Et ensuite, comme à Calon, un travail d’assemblage qui fait partie de notre signature ». Si le Prieuré est un cru de la rive droite, il partage avec les propriétés sœurs une même "écriture technique", pour reprendre les mots de Vincent « On voulait transférer notre savoir-faire. Ce que l’on maîtrise à Calon et Capbern, on l’a transposé ici, au Prieuré et à Vray Croix de Gay ».

De la pierre, de la charpente, de la mémoire

Le projet a nécessité de longs échanges avec les Bâtiments de France. Le domaine étant situé dans un secteur sauvegardé, classé patrimoine mondial par l’UNESCO, le moindre mètre carré construit devait s’intégrer à son environnement. « On a eu un premier projet retoqué. On est à deux pas du centre historique, donc très exposés. Mais dès le départ, notre attitude était claire : s’intégrer dans le site et préserver ce qui pouvait l’être » explique Alain de La Ville, architecte du patrimoine ancien. L’esthétique du bâtiment reprend les codes de Calon : pierre blonde, persiennes, sobriété, et une charpente qui fait écho au cuvier de la rive gauche. « On voulait conserver une certaine parenté d’écriture avec Calon, retrouver des éléments communs, mais en respectant l’esprit du lieu. Ce n’est pas un copier-coller ». Une logique paysanne traverse le projet : « On a gardé l’idée d’une ferme viticole, avec deux ailes de bâtiment. Le seul changement, c’est qu’on a ouvert la cour, alors qu’historiquement elle était fermée. Cela permet une vue sur la propriété ».

Un petit pigeonnier en ruine, vestige d’une ancienne cochonnière surélevée, a failli disparaître. «L’architecte des Bâtiments de France l’a considéré comme un élément patrimonial primordial. On a donc démonté chaque pierre et on l’a reconstruit juste derrière les chais. Il semble avoir toujours été là… mais il est en réalité flambant neuf ».

Autre clin d’œil à l’histoire : la façade nord du cuvier s’appuie sur un mur d’origine, conservé, qui structure l’ensemble et relie le passé à la modernité.

Un balcon sur Saint-Émilion

Le cuvier du Château Le Prieuré, comme des cartes postales sur le vignoble de Saint-Emilion ©J. Bouchet.

Le nouveau cuvier offre plusieurs points de vue spectaculaires : « On a un tableau sur la Dordogne et le château, un autre sur les vignes de Pavie-Macquin et de Troplong-Mondot. Quand on se décale, on voit aussi Trottevieille. C’est un lieu très inspirant », résume Vincent Millet. Au-delà de la technique, ce cuvier est une déclaration d’intention : celle d’installer durablement le Prieuré parmi les propriétés de référence de Saint-Émilion.

Un nouvel écrin pour les propriétés de Suravenir à Saint-Émilion

En poursuivant le chemin à environ 400 à 500 mètres de la Porte Brunet – l'une des entrées historiques de Saint-Émilion – on découvre un ensemble immobilier récemment acquis par Suravenir en 2020. Il s’agit d’un pâté de maisons stratégiquement situé, dans lequel se dessinent déjà les contours du futur siège de la SCEA des Deux Terroirs, entité regroupant les domaines Vray Croix de Gay et Le Prieuré. « Ce pâté de maisons comprend une demeure qui sera dédiée à notre siège social », explique Vincent Millet « Et dans son prolongement, on a un plateau avec plusieurs vocations. » Au rez-de-chaussée, une boutique accueillera les visiteurs et amateurs de vin, leur proposant les cuvées issues des propriétés de Suravenir. À l’étage, un open space verra le jour, conçu pour accueillir des séminaires et réunions professionnelles. Mais le projet le plus ambitieux se cache sous terre, dans une ancienne carrière réaménagée en silo « On a un silo qui est creusé dans la roche, qui nous servira à la fois de lieu de réception pour déjeuner, mais aussi de lieu immersif pour découvrir toutes les propriétés. » Un film immersif y sera projeté sur les parois calcaires, permettant aux visiteurs de découvrir l’univers de Calon Ségur et des autres domaines « Aujourd’hui, avec les outils technologiques, on arrive à faire des choses vraiment remarquables. »


bannière abonnement 109 110