Accueil [Bordeaux Tasting] Riedel, en quatre verres et trois vins

Auteur

Laura
Bernaulte

Date

10.12.2022

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Le temps d’une master class, Anastasia Semanova, responsable marketing et communication de la maison de verrerie autrichienne, a fait vivre aux participants une expérience comparative bluffante, démontrant avec force l’impact de la forme du verre sur la dégustation.

C’est Claus Riedel qui a eu le premier, vers la fin des années 1950, la volonté de créer et commercialiser une collection de verres à pied ovoïdes soufflés bouche, parfaitement adaptés au service du vin. Ce visionnaire a eu l’intuition que la forme et la taille du verre devaient être adaptées aux différents cépages et avaient une influence décisive sur les arômes et le goût. Aujourd’hui dirigée par Maximilien Riedel, l’entreprise propose une gamme de verres de différentes morphologies taillés sur mesure pour les grands cépages mondiaux. Et continue à innover 72 ans plus tard, avec sa collection Véloce, des verres créés à la machine, aussi légers que ceux soufflés bouche mais plus résistants, et aux formes toujours différenciées pour les différents cépages.

À la façon des équipes de la maison de Riedel, les participants à cette master class du samedi de Bordeaux Tasting ont été emmenés dans une dégustation comparative. Devant eux, trônaient deux verres (dédiés au sauvignon blanc et au chardonnay) pour appréhender le château Couhins Lurton blanc 2016 en Pessac-Léognan, et deux autres pour les rouges (pinot noir/nebbiolo, et cabernet/merlot), afin de comparer le pinot noir du domaine des Cognettes 2021 en Val-de-Loire et le grand cru classé de Bordeaux 2016 château Balestard La Tonnelle.

Le sauvignon blanc à l’épreuve

Dans le verre à sauvignon blanc, affichant une forme étroite et resserrée, Couhins Lurton blanc est comme un poisson dans l’eau. « Ressentez-vous cette aromatique qui se déploie tout en fraîcheur sur des notes d’agrumes ? », interroge Anastasia Semanova. Les amateurs approuvent. Dans le verre à chardonnay, au corps large et peu resserré vers le haut, l’approche est toute autre : le nez est fermé, presque inexistant. La forme des verres est incontestablement la raison de cette différence. « Le premier verre est plutôt étroit, il accumule et fait ressortir les arômes frais, explique Anastasia Semanova, alors que dans le 2e verre, les molécules aromatiques s’évaporent. »

En bouche, la différence est aussi flagrante : « On retrouve les arômes frais présents au nez, concentrés par la forme du verre sur le bout de la langue. À l’inverse, avec sa forme large, le second verre, conçu pour des chardonnays boisés, dessert ce vin blanc, qui apparaît alors aromatiquement effacé, mal équilibré et alcooleux. »

Deux rouges, deux verres

Place au pinot noir de Loire ensuite. Dans le verre qui lui est dévolu, à la base large et subtilement resserré vers le haut, ce vin « dévoile de plaisants, subtils et élégants arômes sur les fruits rouges, la cerise, la groseille, classiques de ce cépage, captés en haut du verre », détaille la responsable marketing et communication. Comme sur le vin blanc avant lui, le verre destiné à d’autres cépages démontre la pertinence de l’approche de Riedel. Le verre à cabernet/merlot étouffe en effet les arômes. En bouche le constat est le même : le verre dédié valorise un « joli équilibre et la texture soyeuse des tanins », alors que le second verre met avant tout en évidence l’astringence de ce vin.

Reproduite avec le saint-émilionnais grand cru classé Balestard La Tonnelle, l’expérience se confirme. Dans le verre à cabernet/merlot, ce nectar se dévoile « aromatique, mûr, puissant, et épicé », alors que le verre à pinot noir/nebbiolo laisse en chemin la moitié des notes olfactives, seules celles de fruits mûrs s’exprimant, avec la perte des notes tertiaires. En bouche, le phénomène se répète, avec un vin sur « la même aromatique qu’au nez, avec des fruits mûrs, de la myrtille, et un côté confituré très agréable, détaille Anastasia Semanova, ainsi qu’une belle complexité portée par des tanins présents mais mûrs et bien intégrés. À l’opposé, dans l’autre verre, le vin s’affiche déséquilibré, asséchant et acide. »