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Champagne : la guerre des coiffes n’aura pas lieu ! 

Auteur

Lucie
de Azcarate

Date

28.08.2025

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En 2023, un règlement européen avait rendu la coiffe sur les vins effervescents facultative. En réaction, le Comité Champagne a entamé une procédure pour ajouter la coiffe au cahier des charges de l’appellation afin de préserver cet emblème. S’en est suivi une controverse écologique, les défenseurs de l’environnement reprochant à cet ornement son manque de recyclabilité. Finalement, le Comité Champagne annonce renoncer à sa démarche, sans pour autant condamner la coiffe et renier sa valeur identitaire. Explications.

À l’origine, la coiffe était un cache-misère. Elle dissimulait les restes de lies collées au niveau du col et les différences de niveau de remplissage des flacons alors que le dégorgement à la volée ne permettait pas qu’il soit standardisé. Avec le temps, elle s’est imposée comme un ornement incontournable du vin de la fête sur lequel le monogramme des maisons est souvent apposé. Dans un seau à champagne, les amateurs peuvent reconnaître leur marque fétiche au premier coup d’œil. Alors, lorsqu’un règlement européen a menacé de bousculer l’usage, la filière champagne a engagé, à titre conservatoire, une procédure auprès de l’INAO visant à inscrire l’obligation d’apposer une coiffe dans le cahier des charges de l’appellation.

Un débat au sein de la filière…

Cette initiative a immédiatement suscité un débat. À l’aune de l’écologie, la coiffe a perdu de sa superbe. Généralement constituée de plastique et d’aluminium, elle se révèle difficile à trier et, in fine, à recycler. Certes, certaines maisons prestigieuses arrivent à contourner le problème. Ruinart a, par exemple, choisi une coiffe entièrement constituée d’aluminium pour son Blanc Singulier. Mais tout le monde ne peut assumer les coûts que représente cette innovation, même lorsque la coiffe est constituée de papier, malgré les recherches initiées par le Syndicat Général des Vignerons en partenariat avec Vipalux lorsque l’approvisionnement en aluminium est devenu compliqué en 2022.

Parmi les partisans de la coiffe, on retrouve naturellement les fabricants de capsules. S’ils se rangent, comme de nombreux producteurs, à la cause esthétique, ils ont également élaboré un argument hygiénique. Une étude commandée par le Groupe Créalis auprès d’un laboratoire démontre que coiffes et capsules ont un rôle de bouclier hygiénique en protégeant le goulot lors des nombreuses manipulations de la bouteille.

Pleinement dans son rôle de défense de l’appellation, le Comité Champagne ne s’attendait sans doute pas à une telle controverse. Ainsi pour valider la légitimité de sa démarche et, sans doute pour éviter toute contradiction alors qu’elle pilote en parallèle un label environnemental « Viticulture Durable en Champagne », l’interprofession a choisi de se tourner vers les consommateurs plutôt que de laisser enfler la polémique.

…tranché auprès des consommateurs

Côté consommateur, la tendance serait plutôt conservatrice, les résultats d’une étude démontrent que « la coiffe est perçue par les consommateurs comme un signe identitaire fort du Champagne. Elle influence leur choix, les conduisant généralement à préférer une bouteille coiffée à une autre qui ne le serait pas, même si l’absence de coiffe ne remet pas en cause la préférence Champagne. » La conclusion qu’en tire le Comité Champagne c'est que l'impact étant minime, il n'y a pas de quoi déterrer la hache de guerre  : « L’étude ne met donc pas en évidence un risque significatif, ni pour l’image ni pour les ventes globales de la filière, même si quelques opérateurs faisaient le choix de ne plus utiliser de coiffe. » L’interprofession considère qu’il n’y a pas de risque collectif, c’est aux opérateurs d’assumer leur renoncement.

Finalement, le Comité Champagne a choisi de ne rien imposer, ce qui est encore la meilleure façon de susciter le consensus. D’autant que la coiffe, sans être obligatoire, a vraisemblablement encore de beaux jours devant elle, les opérateurs qui pourraient en assumer l’absence totale sont peu nombreux. La tendance aujourd'hui tient plutôt dans la sobriété que dans le dépouillement et les jupes des coiffes devraient se raccourcir. En parallèle, la recyclabilité des coiffes n'a de cesse que de s'améliorer en collaboration avec les fabricants de capsules prêts à innover pour durer.