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[Covid-19] Les solutions connectées des pros du vin confinés

Auteur

Isabelle
Bachelard

Date

30.04.2020

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En l’espace de quelques semaines, les interprofessions viticoles ont dû modifier leur façon de travailler. Pour pallier l’impossibilité de se réunir, vignerons et dirigeants sont vite devenus experts en téléphone et vidéo.

La scène se passe dans les derniers jours de mars à Saint-Nicolas de Bourgueil (Indre & Loire), où un vigneron roule tout doucement sur un sentier désert. Il faut éviter les secousses car son téléphone est branché en visio-conférence. A l’autre bout de la ligne, Anne-Sophie Lerouge découvre le paysage sur son écran en même temps qu’elle localise le chemin sur le cadastre. Normalement, la représentante d’Interloire devrait être là en chair et en os pour confirmer avec les vignerons du cru le nouveau parcours de Vignes Vins Rando au programme de l’édition du 5 et 6 septembre 2020. Mais en raison du Covid-19 et de ses interdictions de déplacement, il fallait trouver une solution pour voir et valider l’itinéraire. En effet, les vignerons connaissent leur pays, mais son expérience est importante pour décider du temps que les amateurs peuvent marcher entre deux étapes de randonnée ou combien d’arbres il faut pour abriter une pause dégustation. « Ce n’était pas gagné pour certains vignerons qui n’avaient jamais utilisé leur téléphone pour autre chose que parler » déclare celle qui a dû faire preuve de pédagogie, de patience et d’humour pour que la ballade virtuelle se transforme en itinéraire valable. Elle en a vu des gros plans sur les pédales ou le tableau de bord de la voiture quand le téléphone tombait ! Finalement le programme de Vignes-Vins-Randos est prêt, les 17 balades sont au point. La majorité des itinéraires n’ont pu être validés que grâce à la technologie.

Les vignerons se filment

Pour l’École du Vin de Bordeaux, qui assure habituellement des animations et des initiations à la dégustation aux quatre coins du monde, et en son siège bordelais au coin des Allées de Tourny, le confinement empêchait tout activité. Pour ne pas laisser les amateurs désemparés, le CIVB, Conseil Interprofessionnel du Vin de Bordeaux a pris un risque. Il a demandé à certains de ses 50 formateurs, qui sont aussi des vignerons, de se filmer eux-mêmes. « Pour des gens qui ont l’habitude de parler directement à leur public, de faire déguster et réagir les personnes devant eux, ce n’était pas facile », explique Sara Briot-Lesage du CIVB. La spontanéité et l’interactivité disparaissent. Elle poursuit : « On n’avait jamais fait cela, alors certains ont dû refaire leur vidéo plusieurs fois ». Mais le résultat est là, les video-capsules sur le site de l’Interprofession et sur ses réseaux sociaux sont disponibles et suivies. Il suffit de regarder Laetitia Ouspointour expliquer en moins de trois minutes l’ABC de la dégustation ou les accords gourmands pour constater l’adaptabilité des vignerons aux techniques digitales. Ce « Bordeaux chez vous » (voir ici) propose une dizaine de vidéos pédagogiques en plusieurs langues, dont une « cuisine du placard » bien utile en temps de confinement.

Des pros de la visio

Comme leur nom le suggère, les interprofessions réunissent entre eux les nombreux acteurs de la viticulture. On comprend qu’il leur soit difficile de se passer de ces fameuses réunions qui sont au cœur de leur activité. Car pour agir il faut se rencontrer, échanger et finalement décider. Nathalie Chuzeville, directrice de l’ODG (organisme de gestion) des crus du Beaujolais explique que les vignerons sont tous devenus « des pros de la visio ». Ces dernières semaines ils ont réussi à assurer plusieurs conseils d’administration côté Inter Beaujolais et de nombreuses réunions de présidents de crus. Ils ont aussi réalisé des supports pour les lycées agricoles afin de d’assurer la continuité pédagogique aux étudiants privés d’école.

Laure Vaissermann, responsable media et communication interne à Inter Rhône ne n’a pas chômé depuis le 17 mars. Elle a testé tous les systèmes qui permettent de communiquer à distance. Entre la conférence Zoom qui autorise tout le monde à participer et le webinar Livestorm qui n’admet que les interactions par chat écrit, elle a choisi le système conférence, plus naturel et facile d’accès. Mais elle précise qu’il faut « qu’il y ait un modérateur qui explique bien les règles du jeu et que tout le monde coupe son micro avant d’écouter les interventions ». Autrement le désordre et la non-communication menacent. Le prochain conseil d’administration d’Inter Rhône réunira à distance une quarantaine de personnes, reliées par ordinateur, tablette ou même téléphone ordinaire. La séance sera enregistrée, ce qui permettra aux décideurs de la revisionner. Ce sera un galop d’essai avant l’Assemblée Générale. Laure Vaissermann, qui dirige une équipe de six personnes reconnait que sa vie a changé depuis le confinement : « On ne va pas retomber dans les travers d’avant, mais on a besoin d’échanger. Nous avons réuni tout le monde avec l’équipe marketing en visio-conférence. Ils étaient 25 et contents de se retrouver. Ils ne s’étaient pas vus depuis un mois ».