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Le Périgord se convertit à la biodynamie

Auteur

La
rédaction

Date

31.08.2012

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Sur les traces du « pionnier » Jacques de La Bardonnie (Château Laroque, AOC Montravel), une dizaine de viticulteurs se sont convertis à la biodynamie et sont passés sous le label Demeter. Une « révolution verte » qui se déroule en douceur…

Elle serait pourtant plus bio et plus ancienne que la culture biologique. Mais la biodynamie, elle, n’a pas obtenu de label européen au début du mois. Malgré tout, elle continue de se développer, loin de Bruxelles. En Dordogne, dix viticulteurs sont labellisés par l’association Demeter France (du nom de la déesse grecque de l’agriculture et des saisons), basée à Colmar en Alsace.

C’est Jacques de La Bardonnie qui a ouvert la voie il y a plus de vingt ans, au Château Laroque, à Saint-Antoine-de-Breuilh, près de Vélines. « J’étais déjà dans le bio quand j’ai rencontré Patrice Drai qui produisait des plantes médicinales biodynamiques. J’ai été fasciné par la qualité de ses plantes. » Il commence la reconversion de ses vignes en 1991 et observe, dès la première année, un rayonnement de ses plans, avec « des feuilles beaucoup plus larges, bien dressées vers le ciel ».

Vers l’autosuffisance

La biodynamie repose sur plusieurs piliers : la vivification des sols, l’utilisation de préparations « maison » et 100 % naturelles et le suivi du calendrier des semis, qui obéit à l’activité du cosmos. D’abord, il s’agit de développer la vie dans la terre pour renforcer les défenses immunitaires de la vigne. Jacques de La Bardonnie utilise de la bouse de cornes : « On remplit des cornes avec de la bouse de vache et on les enterre en septembre. Lorsqu’on les retire en avril, on pulvérise les vignes avec le terreau qui s’est constitué dans les cornes. Cela donne de la force à la plante, arrête la décomposition pour lui apporter de la nourriture. »

Il utilise également de la silice (du quartz broyé puis préparé), des orties, de l’écorce de chêne ou encore des pissenlits et de la valériane. Tous ces préparats sont composés chez le cultivateur Patrice Drai (société Altaïr) avec une quinzaine d’autres agriculteurs biodynamiques locaux.

Calendrier lunaire

Les matières premières sont elles aussi locales pour respecter le principe d’autosuffisance. C’est la différence avec la culture biologique traditionnelle. La biodynamie proscrit par exemple le guano d’oiseaux marins importé le plus souvent d’Afrique du Sud. Demeter France restreint également les quotas. Le cuivre est limité à 3 kilos par hectare – c’est deux fois moins que pour la culture bio classique. À Saussignac, la petite dernière, Caroline Feely (Château Haut-Garrigue), est en biodynamie depuis un an. Pour lutter contre le mildiou, elle a presque oublié le cuivre grâce à l’écorce de saule. Et elle respecte strictement le calendrier lunaire : « La lune peut à elle seule développer le mildiou alors je peux traiter la vigne à l’avance. »

Beaucoup moins de pertes

Le vin n’en serait que meilleur. « On sent mieux le terroir et le travail du viticulteur car on ne modifie pas artificiellement le sol et on laisse les racines aller plus profondément », explique Olivier Huchette, responsable de certification à Demeter France. D’ailleurs, la biodynamie s’est fait connaître grâce aux grands crus qui la représentent.

Sur les 266 nouveaux agriculteurs en conversion en France, 15 % sont des viticulteurs. Il leur faudra un an pour obtenir le label Demeter s’ils étaient en bio, sinon, trois années seront nécessaires. Le temps de purger les cultures des produits chimiques. Mais certains abandonnent car la transition fait baisser le rendement : « Il faut que la vigne passe de la protection chimique à l’autodéfense, souligne Jacques de la Bardonnie, mais le résultat, c’est que je n’ai que 5 % de perte cette année, mon voisin en conventionnel, 50 %. »

François Chevré