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Luberon : Domaine La Cavale au galop vers le bio

Ci-dessus : Paul Dubrule (à droite) avec le chef Guy Savoy. (photos F. Hermine)

Auteur

Frédérique
Hermine

Date

25.05.2020

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2020 sera le premier millésime bio de La Cavale, propriété de Paul Dubrule en Luberon. Avec l’aide d’Alain Graillot de Crozes-Hermitage, le domaine se perfectionne en rouges de garde et envisage de développer ses blancs.

« Lorsque j’ai acheté cette bastide provençale dans le Luberon comme maison de vacances, il y avait bien quelques hectares de vignes mais le vin ne valait pas un clou, reconnait volontiers Paul Dubrule, propriétaire du Domaine La Cavale depuis 1986 et cofondateur du groupe AccorHôtels. Mais quand Claude et Lydia Bourguignon [microbiologistes] et Alain Graillot [vigneron à Crozes-Hermitage] m’ont dit qu’il y avait de bons terroirs, je me suis lancé ». Et pour cela, il a su bien s’entourer avec Jean-Claude Aubert comme directeur technique, Corinne Conroy pour chapeauter marketing et œnotourisme et Thierry Mueth, son gendre, venu prendre la direction générale il y a deux ans.

Une partie du domaine a été vendue à un trufficulteur (qui paie en truffes), des vignes ont été arrachées, des sélections massales (notamment des syrahs du vignoble d’Alain Graillot) replantées par le célèbre pépiniériste Lilian Bérillon, et une cave impressionnante de 80 m de long a été construite par le non moins célèbre architecte Jean-Michel Wilmotte en 2018. « Quand on veut faire du bon vin, autant s’entourer des gens les plus compétents. Quand Alain Graillot me dit d’arracher tel cépage pour replanter tel autre, j’essaie de comprendre et je suis, même si je perds de l’argent » ironise Paul Dubrule. « La première décision quand je suis arrivé à La Cavale en 2011 a été d’arrêter tous les désherbants et de travailler les sols, d’abord sur 20 hectares puis sur tout le vignoble, ce qui a rendu plus facile le passage en bio », complète Alain Graillot. La certification est prévue pour le millésime 2020. Le domaine au cœur du Parc Naturel du Luberon, et donc particulièrement soucieux de son environnement, utilise désormais des composts de lavande ou des bouchons pour aérer la vigne enherbée un rang sur deux, a installé 550 m2 de panneaux solaires sur le toit, des régulateurs d’eau, des bornes de recharge pour véhicules électriques, et cinq ruches dans le jardin suspendu depuis cet hiver.

« S’écarter de l’opulence des rouges du Sud »

Le vignoble, aujourd’hui une quarantaine d’hectares en production sur Cadenet, Lourmarin, Vaugines et Cucuron, au coeur du Luberon, tout en coteaux jusqu’à 300-320 m d’altitude, produit environ 140 000 bouteilles par an, surtout du rouge (à 60%), vinifié depuis le millésime 2019 en levures indigènes. La couleur est déclinée dans les trois gammes (Petite Cavale, La Cavale et depuis 2012, Grande Cavale seulement les meilleurs millésimes (41 €). Avec cette cuvée d’exception, Alain Graillot vise à élaborer avant tout un vin de caractère et d’en améliorer le potentiel de garde jusqu’à une dizaine d’années. Le vigneron estime que 2017 a été le premier millésime « véritablement comme on voulait ». Le carignan entre désormais à hauteur de 40% dans l’assemblage avec la syrah et le grenache (avant seulement syrah-grenache), élevé ensuite un an en foudres Stockinger. Le pape de la syrah estime que le carignan, cépage noble qu’il ne pratique pourtant pas dans son domaine du Rhône Nord, apporte ici de la finesse et de l’acidité, compense les tanins du grenache et complète l’aromatique et le fruité de la syrah. « Cela permet de s’écarter de l’opulence des vins du sud ».

« Le blanc est l’avenir du Luberon »

Mais pour Alain Graillot, « le futur du Sud et du Luberon en particulier, c’est le blanc qui doit rester frais et équilibré avec une pointe d’amertume. L’objectif est d’en produire davantage mais tous les terroirs ne sont pas propices ; on privilégie les collinettes d’argile ». Le blanc La Cavale (19,80 €) est le seul de l’appellation Luberon à être fermenté et élevé en partie en fûts d’acacia pour préserver l’acidité et le minéral, apporter des notes florales et de la rondeur sans boiser. Le domaine qui estime manquer de blancs devrait replanter grenache blanc, rolle et clairette pour passer de 12 à 20% de la production à moyen terme. Quant aux rosés, uniquement dans la gamme Petite Cavale (28% de la production), ils sont issus des premiers jus de pressurage en grenache-cinsault et ne dépassent pas 12,5° pour conserver leur légèreté (11,50 €).