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Nouveau nom et nouvelles ambitions pour le groupe Delaunay

Auteur

Frédérique
Hermine

Date

17.10.2023

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Il devenait une évidence pour le groupe de Laurent Delaunay de retrouver son patronyme d’origine après avoir construit pas à pas avec sa femme œnologue, Catherine, et désormais avec leur fille Jeanne, un petit groupe familial entre Languedoc-Roussillon et Bourgogne. Celui-ci porte désormais la marque ombrelle « Delaunay, Vins & Domaines »

Le renoncement à son patronyme datait de 1993 lorsque Laurent Delaunay avait dû vendre la maison familiale en 1993 au groupe Boisset alors qu’elle était en grande difficulté, dans le chaos de la guerre du Golfe. Laurent et sa femme Catherine avaient donc fini par partir à la conquête d’autres vignobles et créent la maison de négoce Badet-Clément pour élaborer des vins de marque dans le Sud, avant de reprendre en 2005 le négociant du Languedoc-Roussillon Abbotts devenu Abbotts & Delaunay. Forts d’un joli succès, le couple était alors revenu dans le Nord, d’abord en commercialisant des domaines bourguignons puis par la porte rêvée, le rachat en 2017 de la maison historique fondée en 1893 par l’arrière-grand-père, producteur-négociant-éleveur à Nuits Saint-Georges. Le groupe comprend également une filiale de distribution Domaines et Vins de Propriété (DVP) qui compte environ 250 domaines en portefeuille. Il ne manquait plus qu’une harmonisation générale. C’est chose faire depuis l’annonce hier de la nouvelle marque ombrelle du groupe qui devient Delaunay, Vins & Domaines. Elle correspond également à l’arrivée dans l’entreprise de Jeanne, la fille du couple. Nous avons donc saisi cette double occasion pour questionner Laurent Delaunay sur ce nouveau tournant.

Le nouveau nom est-il destiné à n’être qu’une marque-ombrelle ou il aura vocation à être sur toutes les étiquettes ?
Nos activités vont être placées sous cette nouvelle marque ombrelle qui sera utilisée dans les salons, pour la communication, et peut-être un jour, à la Miguel Torres, sur l’étiquette. En attendant, nos marques principales vont être signées par un membre de la famille, Catherine pour les Jamelles, Jeanne pour les vins d’Abbotts & Delaunay et moi, j’incarne Edouard Delaunay. Avec l’arrivée de Jeanne, nous redevenons réellement familial et multigénérationnel, ce qui fait souvent l’image d’une grande maison. J’avais jusqu’à présent un sentiment d’illégitimité, pas tout à fait languedocien, plus tout à fait bourguignon, à cheval entre les deux mais avec le rachat d’Edouard Delaunay, nous nous sommes rappropriés notre nom et aujourd’hui, nous bouclons la boucle. 

Catherine, Jeanne et Laurent Delaunay

Quel va être le rôle de Jeanne dans l’entreprise?
Avant de se lancer dans ses études de commerces, Jeanne nous avait demandés si ça nous ferait plaisir qu’elle vienne travailler un jour avec nous car elle aimait ce métier, ses valeurs. On lui a répondu que rien ne nous ferait plus plaisir mais on ne voulait pas mettre la pression et il fallait que ça vienne d’elle. Après ses études de commerce, il lui fallait un bagage technique ; elle a donc suivi un BTS viti-oeno à Beaune avec une alternance chez Thibault Liger-Belair puis une vinification à la Romanée Conti, de stages en Australie, en Californie… pour avoir un bagage complet technique, commercial, marketing… Louis-Fabrice Latour m’avait dit : ‘ce métier, il faut 10 ans pour l’apprendre et mieux vaut commencer tôt’ ; Jeanne était de cet avis et elle a voulu rapidement nous rejoindre. Plutôt que de passer par tous les services les uns après les autres, elle préférait avoir une expérience de direction générale. Nous lui avons donc confié en juin un petit périmètre mais généraliste et transversal chez Abbotts & Delaunay, notre plus petite maison. Elle était d’ailleurs les mains dans le marc de raisins jusqu’à la semaine dernière.

Y a-t-il déjà des changements de stratégie prévus par la « nouvelle direction » ? 
Jeanne va revisiter la gamme de ce négoce qualitatif adossé en partie à nos 35 ha de vignes. Ça va forcément bouger. La maison avait d’abord besoin d’être réincarnée car j’étais davantage en Bourgogne ces dernières années et en Languedoc, si l’on arrête de pédaler, on peut vite être distancé. J’ai d’ailleurs ma théorie sur le sujet : le Languedoc est une grosse région de production tirée par un petit nombre de locomotives tandis que la Bourgogne est finalement une petite région de production tirée par un nombre important de producteurs, ce qui explique que le Languedoc doit être poussé en permanence avec toujours plus d’offres. Jeanne a pour objectif d’en faire une maison de négoce à la bourguignonne en illustrant les terroirs avec une approche parcellaire, à développer à partir de nos vignes mais également avec nos partenaires.

Pour les autres pôles, avez-vous défini de nouvelles orientations et axes de développement ?
Nous allons lancer une véritable stratégie RSE. Jeanne qui a cette sensibilité et qui a particulièrement suivi ce sujet pendant ses études va être en charge de ce thème. On vise le label EcoVadis en 2024 et B-Corp en 2026, l’un plus pour le monde agricole, le second plus global et international. Nous sommes déjà en bio dans le vignoble d’Abbotts & Delaunay, HVE pour les Jamelles. En Bourgogne, nous allons continuer sur la lancée d’Edouard Delaunay avec le projet d’acheter des vignes en Hautes-Côtes-de-Nuits qui sont en train d’émerger avec une qualité des vins qui a énormément progressé notamment en bénéficiant du réchauffement climatique; nous avons même l’ambition de devenir l’une des locomotives de cette appellation, même si ça prendra sans doute quelques années. Nous aimerions aussi à terme récupérer quelques belles parcelles en Côtes-de-Nuits et Côtes de Beaune et nous allons peut-être agrandir notre groupe au premier trimestre 2024 en Languedoc si le dossier en cours est finalisé. Nous misons sur un recentrage en Languedoc, un approfondissement en Bourgogne – nous avions un temps pensé nous étendre en vallée du Rhône avec l’achat de quelques vignes à Bollène et Suze-la-Rousse qu’on est finalement en train de revendre car il est compliqué de reprendre une autre région ; les généralistes à l’ancienne n’ont plus cours, aujourd’hui mieux vaut être spécialistes pour tout comprendre et maîtriser.

Vous allez prendre la présidence des Vins de Bourgogne lors du prochain bureau. Est-ce que cela va changer votre organisation ?
J’étais déjà président délégué depuis 2021, représentant des négociants, et nous fonctionnons en binôme avec François Labet pour la production. Je suis au service du collectif depuis de nombreuses années mais pendant deux ans, je voyagerai sans doute un peu moins car je serai un peu plus en représentations pour les vins de Bourgogne.