Accueil [BORDEAUX TASTING] Saint-Émilion : Master Class mosaïque

Auteur

Mathieu
Doumenge

Date

16.12.2018

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La première Master Class de ce dimanche 16 décembre à Bordeaux Tasting était consacrée à la « découverte de la diversité des terroirs de Saint-Émilion à travers les millésimes 2006 et 2016 ». Trois vins, deux millésimes, pour toucher du bout des papilles la richesse et la variété de l’appellation.

La première Master Class de ce second jour de Bordeaux Tasting lançait les affaires sur les chapeaux de roues, avec une thématique riche de promesses pour les dégustateurs présents : « découverte de la diversité des terroirs de Saint-Émilion à travers les millésimes 2006 et 2016 », tout un programme lorsqu’on connaît la mosaïque de terroirs de l’appellation de la Rive Droite. « Saint-Émilion est un vignoble à la géologie très morcelée, on part du plateau calcaire pour passer vers les argilo-calcaires, les sables, on a même des terroirs de graves du côté de Figeac, le tout avec des expositions très différentes. C’est ce qui fait toute la diversité des vins de cette appellation », explique, Laurence Brun, présidente de l’Association de Grands Crus Classés de Saint-Emilion, qui co-animait cette Master Class avec Serge Dubs, meilleur sommelier du monde 1989. L’Alsacien, qui officie depuis 40 ans à l’Auberge de l’Ill à Illhaeusern (68), a fait profiter l’auditoire de toute sa connaissance, sa science de la dégustation mais aussi de sa personnalité chaleureuse, ramenant toujours le vin à ce qu’il est : un moment de plaisir et de partage. Jefferson Desport, journaliste à Sud-Ouest et Terre de Vins, se chargeait de l’animation.

Trois terroirs, deux millésimes, trois grands crus classés étaient à l’honneur lors de cette Master Class.
Le Couvent des Jacobins, propriété familiale (Jean et Joineaud) dont le cœur du vignoble est situé sur le plateau calcaire, est connu pour signer des vins d’un classicisme intemporel et laisser patiemment vieillir ses bouteilles en cave avant de les mettre en marché.
Le château Saint-Georges Côte Pavie, propriété de la famille Masson, loge ses 5 hectares entre les célébrissimes terroirs de Château Pavie et Château Ausone, notamment. Après avoir été longtemps gérée en fermage, elle a été récemment reprise en main par la famille, avec le suivi du consultant Stéphane Derenoncourt.
Le château La Tour Figeac, comme son nom l’indique, est situé sur des terroirs à l’identité différente, plus graveleux, proches de Figeac et Cheval Blanc. Elle est la propriété de la famille Rettenmaier.

Les deux millésimes choisis étaient aussi la promesse d’un grand écart. D’un côté le 2016, sans doute le plus grand millésime bordelais de ces 20 dernières années, ou du moins le plus complet, le plus abouti, le plus optimal, mais encore bien jeune pour être totalement apprécié à sa juste valeur. De l’autre le 2006, un de ces millésimes « négligés » comme aime à le rappeler Laurence Brun, « un millésime qui, comme 2001, 2004, 2008, 2011, 2012, 2014, a souffert d’être comparé à d’autres années ‘stars’ qui le précédaient ou le suivaient, et qui pourtant méritent d’être dégustés aujourd’hui ». Un discours soutenu par Serge Dubs, qui confesse un faible « pour les millésimes compliqués ».

Couvent des Jacobins 2016 séduit par l’éclat de sa robe, sa brillance. Un nez harmonieux, délicat, signé par un fruit bien mûr, des notes de pivoine. Une bouche fine et chaleureuse, portée par une jolie acidité, une agréable fraîcheur. A savourer sur un carré de porc grillé.
Saint-Georges Côte Pavie 2016 affiche une robe un peu peu plus gracile, moins dense. Beaucoup de pureté dans le bouquet, très floral, sur la violette et la griotte. En bouche, beaucoup d’éclat, une texture très souple, des tanins soyeux, mais au final, une jolie amplitude. « Un vin parfait pour un rendez-vous galant », explique Serge Dubs, qui le conseille avec un carré d’agneau et tatin de pomme de terre.
La Tour Figeac 2016 se présente comme le plus dense et le plus profond des trois vins, qui s’annonce plus concentré et tannique que ses prédécesseurs. Le vin est ouvert, dense, riche, intense, parfumé, un peu camphré, avec une belle structure tannique, sans astringence ni amertume. Un vin opulent et généreux, qui promet une belle longévité.

Couvent des Jacobins 2006
dévoile un premier nez sur la confiture de vieux garçon et le kirsch, note de gibier, cannelle. Une touche de fermeté dans les tanins, le vin manque un peu de fond mais il se présente joliment et appelle la table. Serge Dubs le recommande sur un canard au sang ou sur une queue de lotte au vin rouge.
Saint-Georges Côte Pavie 2006, robe ambrée, nez de tabac voire de boite à cigare, se signale par une attaque franche, une ligne droite et longiligne, avec une finale sur la liqueur de café. Un vin qui manque un peu de densité en milieu de bouche mais se marierait bien avec un pigeon au chou.
La Tour Figeac 2006 est une réussite. Encore jeune et dense dans sa robe, un bouquet truffé, fumé, atramentaire, poivré, viandé, survolé par des notes de violette. En bouche, une matière dense et charnue, équilibrée. Un beau classique bordelais, sans maquillage, à savourer sur une belle volaille rôtie.

Photos M.Boudot