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Comment maîtriser la teneur en alcool des vins ?

Auteur

La
rédaction

Date

11.09.2013

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En affichant 14 ou 15 degrés d’alcool, certains vins sortent des clous. Une envolée qui peut avoir des effets sur le plaisir de la dégustation, mais aussi la santé et la ligne. La recherche s’active sur le sujet.

Verre en main, les amateurs le constatent : la teneur en alcool des vins a bondi ces dernières années. Il est désormais courant de voir affiché sur l’étiquette 13, 14, voire 15 degrés ! En France comme ailleurs. Pas l’idéal pour préserver sa santé ou éviter de prendre du poids.

De plus, à la dégustation, pour les breuvages de qualité plus moyenne, un taux élevé peut prendre le dessus et gâcher le plaisir. Le vin est alors déséquilibré. Sans oublier qu’en France les pouvoirs publics ont toujours dans l’idée d’imposer, à terme, un étiquetage en fonction de la teneur en alcool du produit.

« Difficile de continuer comme ça. Nombre de viticulteurs s’inquiètent. Partout, la recherche s’active pour trouver des parades », commente Pierre-Louis Teissèdre. Professeur d’œnologie à l’université Bordeaux-Segalen, il vient d’y organiser un colloque d’envergure sur le sujet, et ce dans le cadre du nouveau réseau Œnoviti International. Des experts du monde entier ont confronté leurs axes de recherche. Dans ces réunions se dessinent ainsi les vins de demain.

« L’ascension des titres alcoométriques est remarquable partout. Pour notre Sud-Ouest, il y a quinze ans, il était de l’ordre de 11 degrés. C’est 13 à 14 aujourd’hui. En Australie, nous sommes passés de 12, 4 en 1984 à 15 en 2008. En Californie, c’était 12, 5 en 1978, pour atteindre 14, 8 de moyenne en 2001 », précise le professeur.

Une envolée historique imputée par les scientifiques au réchauffement climatique. De plus, les parcelles étant mieux tenues et les connaissances davantage vulgarisées, le cep de vigne est une « machine » tournant bien mieux qu’il y a des décennies.

Il existe trois domaines de recherche. D’abord, la vigne : en réformant le matériel végétal actuel, en trouvant d’autres cépages, adaptés à nos latitudes, mais toujours en préservant les caractéristiques gustatives du terroir. C’est le défi.

Concrètement, pour le Sud-Ouest, en proposant toujours des vins frais et désaltérants, l’atout numéro 1 à hauteur du 45e parallèle. En bout de course, on demandera à la plante de produire moins de sucre, puisque c’est lui qui sera transformé en alcool par la fermentation.

Lâcher du lest sur l’irrigation (technique pratiquement interdite aujourd’hui) ; développer, comme en Italie, la culture en pergola (pour protéger les raisins du soleil) ou installer des filets limitant les rayonnements et donc la photosynthèse… Autant d’expériences évoquées lors de ce colloque.

L’idée la plus originale est venue d’une équipe espagnole qui teste la double vendange : à la véraison (les jus sont alors plus acides et peu sucrés), puis à maturité complète du raisin. Les deux vins obtenus sont ensuite assemblés.

Le deuxième terrain de recherche pour faire redescendre le taux d’alcool se trouve au chai, lors de la fermentation alcoolique. Technique sur laquelle l’Afrique du Sud est en pointe. Il s’agit par exemple de sélectionner des levures ne transformant pas tous les sucres contenus dans les baies en éthanol. Ces recherches intègrent aussi des tests avec des organismes génétiquement modifiés.

En général, les levures actuelles obtiennent 1 degré d’alcool avec 17 grammes de sucre. Pendant des décennies, tout le travail des producteurs a visé à obtenir les raisins les plus sucrés possible. Aujourd’hui, c’est presque l’inverse ! Sacré retournement. Même si, sur le millésime 2013, que les vignerons s’apprêtent à vendanger, il ne semble pas que des hauts degrés soient à craindre. Mais, évidemment, la recherche s’attache au très long terme.

Enfin, troisième corde à l’arc des professionnels : les techniques de désalcoolisation. Une fois le vin fini, on réduit le degré d’alcool grâce à des procédés physiques (évaporation sous vide, osmose inverse…). C’est coûteux et cela peut modifier le goût. Précisons – et ce serait le plus simple pour faire baisser les degrés ! – qu’il est interdit en Europe d’ajouter de l’eau dans une cuve de vin (mouillage).

César Compadre (source)