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Le fermage, un modèle pour une viticulture paysanne

@Mathieu Anglada

Auteur

Henry
Clemens

Date

12.04.2024

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A l’instar de Laurence et de Pascale de la Closerie des Moussies, Vincent qui ne se voulait pas chatelain préféra adopter le nom de Clos 19 bis, en réalité l’adresse postale de son chai à Pujol-sur-Ciron. Vincent Quirac, producteur de vins de Graves et de Sauternes, est le visage engageant d’une viticulture bordelaise incarnée. Il possède deux hectares en fermage qui lui suffisent aujourd’hui à produire quelques milliers de bouteilles en rouge et en blanc. En dépit de sa relative discrétion l’homme a su se faire un nom et les cavistes le plébiscitent.

Les bouts de vigne de Vincent Quirac ressemblent à s’y méprendre à des jardins extraordinaires. Ici, on rentre dans un enclos du Sauternais, modèle réduit et soigné. Plus loin, on pénètre dans les rangs enherbés de Graves. L’homme élancé et sec aime ses jolis arpents mais n’y pose pas un pied de propriétaire terrien. Tout est en fermage. Un modèle qu’il chérit, d’autant plus qu’il lui a permis de changer de vie, passant d’une vie de guide de montagne et de déserts yéménites pour aller s’essayer à la viticulture. On le retrouve d’abord à Gaillac chez Patrice Lescarret, où il fait ses armes. Il obtient un bac pro – une formation, dont il dit, qu’elle lui enseigna ce qu’il ne faut surtout pas faire – et poursuit par une expérience rude dans un château de la rive droite pour finalement, avec quelques sous en poche, mettre la main sur quelques hectares de rouge et de sauternes. Il travaille un patchwork de parcelles, souvent non mécanisables, et de types de sols qui lui permettent de dessiner une gamme de vins parfaitement distincts. Un arpent par ci et un enclos par-là, le voici désormais bientôt à la tête de deux hectares. Ce qui le conduit à répéter qu’il ne faut pas être crésus pour faire un vin. Le petit-fils de gemmeur a beaucoup aimé les immaculés espaces kirghizes, une des raisons, certainement, pour lesquelles il choisira dès 2012 de tout convertir en bio. Patrice Lescarret, l’ami cher, l’initia à la dégustation. « Je n’y connaissais rien, mais j’ai toujours été sur le goût des choses. » Aussi est-ce en vigneron humble qu’il se tient au bout de ses arpents et clos en fermage. La production reste on ne peut plus discrète avec, les bonnes années, 5 000 cols. Le chai, pas tape-à-l’œil pour un sou, est à dimension humaine. On s’arrête forcément sur cette étiquette intrigante et discrète du Clos 19 bis qui annonce le vin d’un artisan-vigneron, désormais presque culte. 

Son sauternes sans contre-étiquette, revêt les lumières d’un doux automne, s’impose en toute légèreté avec des acidités surprenantes et possède l’étoffe d’un grand et frais liquoreux. Bien avant on se régala d’un vin de Graves rouge 2022, à la fraîcheur tout à fait enthousiasmante.