Accueil Ruinart et David Shrigley « unconventional » à l’Opéra Bastille

Ruinart et David Shrigley « unconventional » à l’Opéra Bastille

Auteur

Frédérique
Hermine

Date

09.03.2020

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La Maison Ruinart du groupe LVMH a confié cette année à l’artiste britannique David Shrigley le soin de réinterpréter la marque. Une trentaine d’œuvres ont ainsi été dévoilées en compagnie du président Frédéric Dufour et du chef de caves Frédéric Panaïotis à l’Opéra Bastille à Paris la première semaine de mars.

Dans les coulisses cachées de l’Opéra Bastille, plusieurs centaines d’invités ont découvert l’univers de David Shrigley sur les parois et dans les couloirs de béton brut aux gigantesques volumes. Parmi eux, de nombreuses personnalités du monde de la mode, du spectacle, de la gastronomie, Charlotte Le Bon, Mélanie Laurent, Anna Mouglalis, Jean-Charles de Castelbajac, Pierre Hermé, Woodkid… accueillis au son d’une jeune DJ aux cheveaux rouges puis des vocalises de la cantatrice Véronique Chevallier perchée dans une alcôve en haut de la grande cathédrale de béton et interprétant divinement un air de Norma de Bel-lini. Il fallait profiter de ce lieu exceptionnel comme l’indiquait une phrase au néon « It won’t be like this forever » (ce ne sera pas comme ça pour toujours). Une sentence de David Shrigley qui résonnait d’autant plus dans le contexte actuel.

En résidence d’artiste

Chaque année, la Maison Ruinart accueille à Reims un artiste contemporain international afin qu’il livre sa vision de la maison rémoise bientôt tricentenaire. Après le chinois Liu Bolin (2018) et le brésilien Vik Muniz (2019), c’est un britannique, David Shrigley, qui interprète la marque à travers 36 dessins et gouaches, 3 néons, 2 céramiques et 1 porte. Ce grand quinqua au flegme presque indolent, est un artiste corrosif qui porte son regard avec ironie sur le monde contemporain, usant d’un dessin rudimentaire souvent accompagné d’une phrase absurde pour interpeler et alerter. Il se veut un poil à gratter sans se prendre au sérieux. Lors de sa résidence artistique, il a parcouru le vignoble, exploré les caves, noté chaque expression entendue ou geste aperçu. « Lorsque l’on décide de faire une œuvre sur le thème de la fabrication du champagne, il faut visiter plusieurs fois la région, il faut échanger avec les professionnels en les écoutant attentivement, puis visiter les crayères, les vignes et les installations de production. Il faut apprendre à déguster du champagne sans oublier de faire la liste des choses à dessiner ». C’est ce qu’il a fait en rencontrant longuement dans le labyrinthe des crayères le chef de caves Frédéric Panaïotis. Il a sculpté pendant trois jours sur les murs des caves classées au patrimoine mondial de l’Unesco, sous la butte Sainte Nicaise, sa vision de la pro-duction des vins, un chariot élévateur, les visages de ceux qui travail-lent sous terre afin d’ajouter sa patte aux innombrables graffiti qui recouvrent déjà les parois des crayères à plus de 30 m sous terre.

Dessins, gouaches… et coffret pour jéroboam

Après ces nombreux échanges au sein de la maison rémoise, David Shrigley a produit une centaine de dessins ; une trentaine a été conservée pour les expositions. « Je n’ai jamais réfléchi à la manière dont le champagne était élaboré. Donc c’était l’occasion de considérer la production de champagne d’un point de vue métaphorique ». A travers ses dessins, néons et sculptures, David Shrigley propose un parcours à la fois bienveillant et singulier, provoquant des conversations surprenantes entre la nature et les étapes de l’élaboration du vin. Il sensibilise par la même occasion aux enjeux environnementaux défendus au quotidien par la Maison Ruinart, car l’humour est sans doute un des meilleurs messagers pour une prise de conscience généralisée. Il a intitulé sa ré-interprétation artistique « Unconventional bubbles » (bulles singulières). Dans ce cadre, il a imaginé un écrin en édition limitée pour un jéroboam de Blanc de Blancs. Chacun des 30 coffrets ornés d’un damier reprenant l’un des dessins créés par l’artiste pour la Maison, est numéroté et signé. Ils contiennent un jéroboam dont également réinterprété par David Shrigley. C’est la première fois qu’un artiste intervient directement sur l’emblématique flacon Ruinart, dont la forme est héritée du 18ème siècle. Objet fonctionnel, le coffret se métamorphose en seau à champagne au moment de la dégustation, sa base pouvant accueillir de la glace pour rafraîchir la bouteille. David Shrigley a choisi d’utiliser un jéroboam en raison de sa capacité de conservation exceptionnelle. Le vin y vieillit moins vite et exprime plus de complexité, de fraîcheur et de diversité aromatique, développe davantage d’arômes de maturation (toast, arômes grillés, amandes grillées), de corps en bouche et un ca-ractère plus soyeux.

Les œuvres devraient être exposées au public dans 37 foires d’art contemporain dans le monde et en France lors des foires Art Paris, du 5 au 8 avril 2020, la Fiac, du 22 au 25 octobre 2020, et Paris Photo, du 12 au 15 novembre 2020.

Photos DR et F. Hermine