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« Capter un maximum d’eau et la conserver » pour combattre la sécheresse

Auteur

Jean-Charles
Chapuzet

Date

23.02.2023

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Quelques gouttes de pluie commencent à tomber sur le vignoble bordelais mais la sécheresse est bel et bien là. A-t-elle déjà un impact sur la vigne ? En fonction des terroirs de chacun, comment les vignerons s’organisent-ils ?  

On le sait, à Saint-Emilion notamment, le calcaire forme une éponge salvatrice pour la vigne si tenté que le système racinaire soit profond. Et la sécheresse du millésime 2022 a finalement délivré sur les grands terroirs calcaires des jus sublimes. Pour autant le manque d’eau qui se prolonge en ce début d’année 2023 est visible à l’œil nu. « Il est clair que nous avons un hiver très sec, je n’ai jamais vu le niveau aussi bas, nous avons des points de repère à la base du calcaire à astéries de Saint-Emilion où se trouve la couche imperméable d’argiles bleues et c’est là que nous trouvons le niveau, on constate en effet que la nappe phréatique est extrêmement basse », explique le propriétaire des Châteaux Ausone, La Clotte ou Simard. Mais Alain Vauthier n’est pas du tout inquiet : « La sécheresse pour la vigne n’a aucune influence, c’est la culture qui supporte le mieux la sécheresse, la preuve fut le millésime 2022, la problématique pour moi concerne davantage les haies que nous créons dans le vignoble, ce sont des jeunes plantations qui n’ont pas de chevelu racinaire alors là il faut arroser ». Par ailleurs, Alain Vauthier a observé qu’une vigne peut stresser quand un millésime de sécheresse succède à un millésime très humide. Mais la succession de millésimes de sécheresse que nous connaissons n'entraîne pas ce phénomène, la plante s’adaptant.

 L'hiver, période cruciale

Le grand défi pour la vigne est de plonger son système racinaire le plus profond possible. Dans les terroirs de graves qui composent et font la réputation du Médoc plusieurs actions viennent répondre à cette sécheresse. Pour Vincent Bache-Gabrielsen, directeur des Châteaux Pédesclaux et Lilian-Ladouys, le gros du travail est de conserver au mieux la fraîcheur avec des engrais verts. « Pour nous le souci est davantage le gel que la sécheresse mais il est clair que les semis d’engrais verts et de tous les composts apportent de la matière organique, nous voulons capter un maximum d’eau et la conserver, c’est notre mission ». Ainsi, aux vignobles de la famille Lorenzetti, c’est davantage une réponse à l’évolution de la climatologie de ces dernières années qu’une réaction à court terme sur cette sécheresse de ce début d’année 2023. Mais cette période hivernale où la vigne est peu réceptive représente un moment crucial pour capter les éléments propres à éviter toute forme d’évaporation afin de stimuler la microbiologie. Du côté des Côtes de Bourg, le directeur du syndicat Didier Gontier observe également ce travail chez les propriétaires. « Toutes les techniques sont les bienvenues, mais c’est vrai que nous aussi nous tremblons davantage pour le gel que pour la sécheresse, il n’empêche que nous allons de record en record concernant le manque d’eau, c’est encore un souci supplémentaire pour les vignerons », souligne-t-il. Au-delà de la résilience de la plante et du travail des vignerons, des évolutions de style émergent aussi ici ou là comme notamment le cépage malbec que les vignerons des Côtes de bourg apprécient de plus en plus. « Cet outil végétal est une réponse, il supporte bien le réchauffement climatique et certains vignerons jouent même la carte du mono-cépage sur des cuvées », ajoute Didier Gontier. D’une manière générale, le vignoble bordelais s’adapte à la sécheresse, le principal ennemi reste les impacts climatologiques brutaux, des très fortes températures aux épisodes tardifs de gel en passant par des pluies massives qui font le lit des maladies.