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La reconnaissance d’un terroir viticole en trois questions

Auteur

Clément
L'Hôte

Date

03.12.2020

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La France compte plus de 400 labels viticoles, les fameuses AOC et IGP. Les nouveautés en la matière, comme la récente homologation des Pouilly-Fuissé 1er cru, sont rares. Et donc scrutées de prêt. Pourquoi faut-il des années pour reconnaître un produit ? La procédure est-elle juste et impartiale ? Décryptage.

« Le vin, c’est de la géographie liquide ». Derrière la formule efficace d’Erik Orsenna se cache une procédure complexe. La reconnaissance d’une AOP (appellation d’origine protégée) ou d’une IGP (Indication géographique protégée) est due à tout, sauf au hasard. Trois questions pour s’y retrouver :

Pourquoi est-ce si long ?
14 ans pour reconnaître les Pouilly-Fuissé premier cru, plus de 20 ans pour mentionner Nyons dans les Côtes du Rhône Village… Toute création d’appellation ou modification majeure de celle-ci demande de la patience. En cause, une procédure stricte, en 5 étapes :

1. Le montage du dossier. C’est la « lettre de motivation » des représentants de l’appellation. En quoi ce vin est-il le reflet de sa région, pourquoi mérite-t-il reconnaissance ? Analyses de sol, études historiques, dégustations… Le collectif doit se mettre d’accord, et il faut parfois des années avant que l’argumentaire n’arrive sur les bureaux de l’Inao (Institut national de l’origine et de la qualité). Seul un dossier étoffé passera ce premier écrémage.

2. L’instruction. C’est « l’entretien d’embauche ». L’Inao nomme une commission d’enquête composée de représentants des viticulteurs, du négoce, des consommateurs et de l’administration. Le groupe part plusieurs fois à la rencontre des demandeurs, pour peaufiner le cahier des charges. Là aussi, des années peuvent s’écouler avant le rapport final. Rapport qui sonne la fin du travail technique, et le début d’un marathon administratif.

3. La consultation publique ou « procédure nationale d’opposition ». Pendant deux mois, tout viticulteur de la zone qui n’aurait pas eu voix au chapitre peut exprimer son mécontentement. Si c’est le cas, retour à l’étape 2…

4. L’homologation par L’État. C’est officiel, nous avons une nouvelle AOC ou IGP

5. L’homologation par l’Union Européenne. Via la commission européenne, qui appose le tout dernier tampon. L’appellation peut désormais être revendiquée dans tous les états membres. L’AOC devient AOP.

Quelle garantie de qualité ?
La qualité d’un produit d’appellation relève du goût de chacun. Ce que garantit la procédure, c’est son authenticité. La zone est délimitée, parcelle par parcelle, et le mode de production encadré : cépages autorisés, rendements et degrés maximum… Le tout pour aboutir à un produit typique, reconnaissable. Et ce cahier des charges est toujours élaboré en même temps que son plan de contrôle.

Quelle garantie d’impartialité ?
La commission d’enquête, dont le rapport va conditionner le reste de la procédure, est composée de professionnels venant de toute la France… sauf de la zone étudiée. L’idée est d’éviter un conflit d’intérêts. Exemple : pour travailler sur une appellation du Bordelais, les enquêteurs viendront d’Alsace, de Bourgogne, ou encore du Languedoc.