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[Vinisud] Cépages résistants : le Languedoc mise sur les variétés occitanes

Auteur

Idelette
Fritsch

Date

20.02.2018

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Alors que la recherche française planche sur plusieurs variétés résistantes aux maladies cryptogamiques, le Conseil Interprofessionnel des vins du Languedoc mise sur les créations variétales développées depuis 40 ans sur le site de l’Inra Pech-Rouge, dans l’Aude. Lundi 19 février, 7 vins du futur étaient présentés en dégustation au public en amont des premières plantations, prévues en 2018. Une première française.

Ils n’ont pas de nom, juste un numéro, mais ces vins – 4 rouges, deux blancs et un rosé – « ni habillés ni assemblés », pourraient bien être les vins du futur. Sélectionnés parmi une trentaine de micro-vinifications par le Conseil interprofessionnel des vins du Languedoc (CIVL), au terme de plusieurs comités de dégustation (un par an depuis 2O14, année du premier millésime historique), ces vins issus de parcelles expérimentales plantées sur le site de l’Inra Pech-Rouge, dans l’Aude, représentent une innovation de rupture.

Surtout, ils affichent des caractéristiques œnologiques étonnantes (PH entre 3,21 et 3,91 ; degrés oscillants entre 14,75° et 10,1° pour les variétés à faibles degrés, etc.), des profils organoleptiques intéressants et des « parents » obtenus par rétrocroisement avec des cépages régionaux type Grenache, Fer Servadou (ce cépage du sud-ouest est également connu sous le nom de Mansois ou Braucol), ou Marselan, une variété Inra obtenue par croisement entre le Grenache noir et le Cabernet-Sauvignon.

Zéro traitements depuis dix ans

« Ces constructions génétiques par hybridation conçues pour encaisser les maladies aggravées par le réchauffement climatique type mildiou ou oïdium, ont été sélectionnées à partir des années 70 par le chercheur montpelliérain Alain Bouquet qui les a expérimentées en Languedoc. Elles sont donc adaptées aux conditions du sud de la France », explique Hernán Ojeda, directeur de Pech-Rouge. A partir de 2008, ces premiers hybrides A. Bouquet tolérants aux maladies ont été plantés sur une parcelle expérimentale au cœur de ce site propriété de l’Institut national de la recherche agronomique (Inra), dans le massif de La Clape. Ils n’auraient connu depuis aucun traitement phytosanitaire.

Afin de déterminer à présent « la durabilité de résistance de ces variétés aux maladies » en contexte méditerranéen, le programme se poursuit dans le cadre d’OsCar Oc, émanation régionale de l’Observatoire national du déploiement des cépages résistants créée l’an passé dans le cadre d’un partenariat Inra-IFV.

« Nous allons dans les prochaines semaines pouvoir planter, essayer et déguster chez nous ces cépages pour voir s’ils sont compatibles avec nos sols, nos climats et les modes culturaux employés sur nos domaines », se réjouit Bernard Augé, le directeur adjoint du CIVL. Avec 90 hectares d’intentions de plantation impliquant 60 vignerons, 12 premiers hectares seront plantés en 2018 sur les trois départements de l’Aude, du Gard et de l’Hérault… En attendant l’inscription au catalogue de ces variétés, attendues en 2021.

Notes de dégustation : 3 résistants à expérimenter

1/ G5 B, parent Muscat de Hambourg, millésime 2016, 10,1° d’alcool, PH 3,36
Figurant parmi les trois variétés à faibles degrés développées depuis 2005 dans le cadre de ce partenariat Inra-CIVL, ce blanc issu de cépage Muscat de Hambourg, en vinification classique (pressurage direct), présente une robe très claire et une jolie acidité.
2/ 3159 – 2 – 12 B, parent Aranel (Chasan/Chardonnay), millésime 2017, 14,20°, PH 3,32
On quitte le domaine des faibles degrés pour cette variété dont le dernier Vitis Vinifera en rétrocroisement est le Chasan, une obtention variétale Inra. Belle minéralité en bouche pour ce vin blanc relativement complexe.
3/ 3160 – 12 – 3 Rs, parent Fer Servadou, 2017, rosé, 14,75°, PH 3,21
Avis très partagés pour ce rosé très coloré, perçu par les uns comme très chimique limite malabar, présentant pour les autres un profil original explorant les notes balsamiques plutôt que florales. Son grand intérêt provient de la rusticité de son parent, le Fer Servadou, qui confère à ce vin une robe soutenue. « Alain Bouquet a choisi pour parents de ces créations variétales des cépages rustiques comme le Fer Servadou, annonçant des vins de bonne garde avec des tanins qui s’expriment », commente le chercheur retraité Alain Carbonneau.