Accueil Vins étrangers : un amendement impose la mention de l’origine sur l’étiquette

Vins étrangers : un amendement impose la mention de l’origine sur l’étiquette

Philippe Huppé, député de la 5eme circonscription de l’Hérault

Auteur

Idelette
Fritsch

Date

05.06.2018

Partager

Le texte, voté en première lecture samedi 26 mai à l’Assemblée Nationale, pourrait imposer, demain, la mention de l’origine sur l’étiquette « frontale » des vins étrangers commercialisés en grande distribution (GD) sous une mention trompeuse.

Lundi 4 juin en conférence de presse, le député audois Alain Péréa savoure sa victoire. Et pour cause ! Son projet d’amendement à la loi Egalim (issue des Etats généraux de l’alimentation) visant à imposer la mention du pays d’origine sur l’étiquette « frontale » des vins commercialisés en GD, vient d’être adopté. Voté en première lecture samedi 26 mai à l’Assemblée Nationale, cet amendement pourrait changer beaucoup de chose autour d’un geste, en apparence anodin… mais lourd de conséquences pour la filière viticole régionale, confrontée à l’afflux de vins espagnols vendus sous une étiquette trompeuse.

« Il permettra, demain, d’éviter lorsque l’on choisit un vin sur les linéaires d’un supermarché, de prendre la bouteille, de la retourner et de chercher dans le texte en grande partie publicitaire apposé sur la contre-étiquette, ou pire sous le Bag in Box de 5 litres, l’origine de production du vin qui souvent ne s’y trouve pas, ou en tout petit », explique Philippe Huppé, député de la 5eme circonscription de l’Hérault (photo ci-dessus).

Les vins espagnols dans le collimateur

C’est pour lutter contre les « pratiques dolosives visant à tromper le consommateur » et l’afflux massifs de vins espagnols commercialisés en GD sous une étiquette confusante, qu’une trentaine de députés emmenés par Alain Péréa (Aude), avaient co-signé ce projet d’amendement.

Adopté par une soixantaine de députés tous bords lors d’un décompte manuel serré dans l’hémicycle, ce projet de loi, en procédure accélérée, pourrait être adopté en septembre prochain en commission mixte paritaire (CMP), pour une publication du décret d’application, espérée courant 2019.

De quoi réjouir les représentants de la filière viticole régionale, au premier chef desquels le Syndicat des Vignerons de l’Aude à travers son président, Frédéric Rouanet. Il s’est exprimé, lundi 4 juin, sur les conséquences, préjudiciables pour les vignerons d’Occitanie, de telles pratiques : « On estime que 600 000 hectolitres de vins espagnols sont vendus sur les linéaires des super et hypermarchés sous une étiquette laissant croire qu’il s’agit de vins français. Et je ne parle même pas des vins au pichet vendus dans les restaurants ou cafés, pour lesquels le préjudice n’a pu être estimé. Nous n’avons pas à payer cette usurpation de notoriété pour vendre le vin des autres, cet amendement permettra à la brigade d’enquête viticole de la Direction de la concurrence, de la concurrence et de la répression des fraudes (GCCRF) de mettre, demain, les fraudeurs hors d’état de nuire ».

Réglementation européenne : les limites

Victoire certes, mais demi-victoire, ce projet de loi buttant face à la législation européenne. « La réglementation européenne interdit de stigmatiser les produits issus de la Communauté européenne, sauf en cas de soupçon de fraude entraîné par un packaging ou un emballage induisant le consommateur en erreur. La mesure ne pouvait donc être générique, générale et absolue », précise Romain Prax, attaché parlementaire du député Alain Péréa. Traduction ? Seuls les vins étrangers dont les étiquettes prêtent à confusion sur l’origine de production, sont concernés par cette mesure. Les autres vins, même espagnols, ne feront pas l’objet d’une mention spécifique, si leur étiquetage est clair.

« Que l’on mette, demain, Vino de Rioja (vin de la Rioja en Espagne, NDLR) avec une danseuse andalouse ou un taureau sur l’étiquette faciale des bouteilles, et on verra bien si le consommateur français achète ces vins », se réjouit tout de même Alain Péréa. Le député audois veut pour preuve de cette avancée, les pratiques patriotiques des consommateurs français. Une étude sur le marché GMS France, publiée en février 2017 (source IRI en cumul annuel mobile, fin 2016), met en évidence que les vins IGP de département surperforment sur les rayons comparés aux vins sans IG Espagne, quand la mention origine Midi de la France est clairement précisée. « On s’aperçoit que quand l’étiquetage est clair, la rotation de nos vins français sur les linéaires est beaucoup plus importante en chiffre d’affaires et en volume. Clairement, le Français préfère acheter du vin français », explique Jérôme Villaret, Délégué général du Conseil interprofessionnel des vins du Languedoc (CIVL).

Tout en saluant cet amendement perçu comme une « réelle et belle avancée dans la clarté de l’étiquetage des vins commercialisés », le président du CIVL Xavier de Volontat, en pointe les limites : « qu’en est-il des vins apatrides, ces vins étrangers dont on sait qu’ils peuvent être mélangés à des vins français et commercialisés sous la mention VDPCE (Vins issus de différents pays de la communauté européenne) ? Il n’y a pas de solution aujourd’hui pour ce type de vins, sauf à informer le consommateur des implications que cette mention recouvre. »