Accueil Gel de printemps : en Loire, c’est reparti pour un mois d’angoisse

Gel de printemps : en Loire, c’est reparti pour un mois d’angoisse

Auteur

Julie
Reux

Date

05.04.2019

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Muscadet, Saumur, Bourgueil, Chinon… Le gel a frappé la plupart des vignobles de Loire dans la nuit du mercredi 3 au jeudi 4 avril 2019, jusqu’à -4°C. L’impact est encore difficile à évaluer, mais le pire paraît avoir été évité. Pour l’instant.

Dans le vignoble de Loire, le gel a encore frappé. C’est la troisième fois en quatre millésimes, après 2016 et 2017, que les vignerons font face à ces températures négatives en pleine saison de « débourrement », cette étape cruciale de la sortie des premières feuilles, des premiers bourgeons.

Des dégâts sur les secteurs « prime »

Dans la nuit de mercredi à jeudi, le thermomètre est « descendu jusqu’à -4°C, voire -4,5°C » du côté de Saumur-Champigny, relate Julien Fouet, vigneron du domaine Fouet. Ailleurs, on signale des -3°C dans le Muscadet, Bourgueil, Chinon… « Il est trop tôt pour évaluer l’impact », prévient François Micol, directeur de la fédération des vins d’Anjou. Il est en effet compliqué de prédire la réaction de la plante. « Ce qui peut faire la différence, c’est l’état du cycle végétatif, explique François Robin, directeur de la fédération des vins de Nantes. Dans les secteurs où la feuille était déjà bien sortie, les secteurs dits « prime », il y aura plus de dégâts. Mais ailleurs, il peut y avoir un potentiel de reprise. » La différence se verra « dans 15 jours, trois semaines »… mais surtout au moment des vendanges 2019.

Les éoliennes ont tourné toute la nuit

En attendant, dans la plupart des domaines, la nuit a été agitée : « On a allumé les éoliennes dès 22h30 et jusqu’à 9h du matin », explique Julien Fouet, vigneron à Saint-Cyr-en-Bourg (Saumur). « Là où on n’en a pas encore, on a mis des bougies, des brûlots… » A Chinon, Francis Jourdan (président du syndicat) est équipé de système de protection par aspersion. « Mais on joue sur du velours. On ne doit pas le déclencher trop tôt, ni trop tard… Il n’y a pas de scenario à suivre, c’est vraiment compliqué. »

Dans certaines régions, les gels à répétition ont au moins eu la vertu d’inciter les vignerons à s’équiper de systèmes de protection. A Chinon, 60 tours antigel ont ainsi été installées depuis le fameux printemps 2017, protégeant 550 hectares de vignes, sur les 2400 de l’appellation. A Saint-Cyr-en-Bourg, 8 domaines se sont associés pour protéger 40 hectares avec 8 éoliennes. « Après deux grosses années de gel, ce n’était plus possible de ne rien faire, résume Julien Fouet. On en avait besoin, au moins psychologiquement, mais aussi pour la situation de nos entreprises. »
De plus en plus, il se dit en effet dans le vignoble que ce scenario de débourrement précoce, suivi de gelées en avril, voire en mai, est en passe de devenir la norme. « C’est difficile de se projeter, résume Olivier Martin, vigneron du Muscadet, assez abattu. Si tu perds une récolte tous les trois ans, le système ne marche plus. » A chaque coup dur, c’est la capacité d’investissement de l’entreprise qui diminue, la clientèle qui part ailleurs…
Bref : au-delà de l’impact sur la récolte, cette nuit de gel a réveillé de sombres angoisses dans le vignoble. Et ça va durer encore au moins un mois, jusqu’aux fameux saints de glace, saint Mamert, saint Pancrace et saint Servais, traditionnellement célébrés les 11, 12 et 13 mai.