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À la découverte de la Bourgogne avec les Ateliers Prestige

Auteur

Pauline
Gonnet

Date

08.03.2018

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Parti du double constat que d’une part, la renommée de la Bourgogne lui permet de diversifier ses activités de communication sans avoir à se focaliser sur la simple reconnaissance de ses appellations, et d’autre part qu’une communication efficace ou passe en grande partie par la formation, le BIVB (Bureau interprofessionnel des vins de Bourgogne) a mis en place des « Ateliers Prestige » depuis 2015.

Ces derniers sont destinés aux professionnels (agents, sommeliers, cavistes, acheteurs…), considérés comme des ambassadeurs du vin, demandeurs d’une communication spécifique et parfois plus pointue que celle à destination des amateurs, afin de pouvoir représenter les vins bourguignons de façon la plus éclairée possible.

Sillonnant la France, le deuxième atelier de l’édition 2018 (après Toulouse et avant Aix-en-Provence, Strasbourg et Rennes), a fait étape ce lundi 5 mars à Grenoble, au restaurant gastronomique Le Fantin-Latour, dirigé par le chef Stéphane Froidevaux et son épouse Léa, que ses 4 toques Gault et Millau ne quittent pas depuis 2011.

Priorité aux vins « singuliers et inattendus »

L’hyper-renommée de certaines appellations, doublée des difficultés climatiques dont a souffert la Bourgogne ces dernières années (et ayant entraîné les ventes vers des appellations moins célèbres mais demeurant plus accessibles), ont naturellement imposé le thème de ces ateliers, soit les « Bourgognes singuliers et inattendus », issus d’appellation traditionnellement moins connues du grand public.

Car si les vins de Bourgogne occupent une position de leader (aux côtés des vins de Bordeaux), sur les marchés CHR comme grande distribution (notamment pour le segment des vins compris entre 10 et 20 €), c’est aussi une vaste région, riche de 84 appellations, dont toutes ne bénéficient pas du même positionnement auprès des consommateurs.

Dominique Lambry, responsable de la formation au BIVB, illustre ce constat par la différence existante entre les demandes des clients chez les cavistes, et les ventes finalement réalisées : « les plus demandés sont les appellations comme Chablis, Pommard, Mercurey, quand les ventes réalisées seront en premier lieux des vins de l’appellation Ladoix, suivis de Saint-Aubin, Santenay ou Rully ».

Co-animé par Dominique Lambry et Fabrice Sommier (MOF sommelier en 2007 et ancien chef sommelier chez Georges Blanc, à Vonnas dans l’Ain), cet atelier a été l’occasion d’apprécier des vins d’appellations moins mythiques, et parfois de domaines inconnus, qui n’ont souvent rien à envier à leurs confrères et consœurs desdites célèbres appellations.

Yonne again

L’Yonne est surtout célèbre pour les vins de Chablis, mais compte d’autres pépites. Elle a longtemps été productrice de vins de table, du fait de sa proximité avec Paris, mais le phylloxéra ainsi que l’avènement du chemin de fer à une période proche (entraînant la montée de vins du sud sur les tables, notamment parisiennes) ont mis un terme à son règne sur ce segment. Puis les méandres de la règlementation des appellations d’origine contrôlée ont ajouté encore quelques obstacles pour certains vignobles, comme par exemple pour celui de Chitry, originairement rattaché à Chablis mais majoritairement plantée en aligoté, et non en chardonnay, ne lui permettant ainsi pas d’accéder au sacro-saint statut de l’appellation Chablis, accordée en 1928 à cette dernière et exigeant uniquement une production issue de chardonnay.

Appellation depuis 1990, « voisine kimméridgienne » de Chablis, étendu sur 65 hectares et comptant une douzaine de producteurs, livre de très jolis vins, à l’image de celui de la maison Simmonet Febvre. Dégusté sur le millésime 2015, il présente une « belle identité classique, à accorder joliment avec un sandre au beurre blanc, ou juste poché », selon Fabrice Sommier.

Autre représentant de la région de Chablis et du Grand Auxerrois, le Bourgogne Côte d’Auxerre du domaine Jean-Louis et Jean-Christophe Bersan, sur la cuvée « Louis Bersan » en 2015.

Contrairement au Chitry, élevé en cuve inox, celui-ci est passé par des demi-muids de 500 litres et 10% du fût neuf, ce qui lui confère un équilibre agréable entre rondeur et tension, surtout en finale, qui font de lui un partenaire idéal des ris de veau ou d’une volaille de Bresse à la crème, selon l’expérience de Fabrice Sommier.

Les pépites accessibles du Mâconnais

230 kilomètres au sud, et l’on arrive dans le Mâconnais, hébergeur de très jolis vins accessibles, comme le Pouilly-Vinzelles « Les Quarts » de la Cave des Grands Crus blancs, en 2015.

Là aussi, l’appellation a son histoire, et en est fière : refusant de se fondre dans l’AOC Pouilly-Fuissé, dans les années 30, elle a fait le choix de son identité propre, comme Pouilly-Loché, et n’abandonne pas son ambition d’acquérir à terme la notoriété de Fuissé, bien qu’à elles deux, leur production représentent le dixième de celle de leur grande voisine.

La cuvée de la Cave des Grands Crus représente un très bon rapport prix/plaisir : avec un bouquet végétal où domine l’acacia, et où la tension légèrement présente permet à la rondeur de s’exprimer, le millésime 2015 (pas toujours le préféré des puristes) offre ici son expression charmeuse et accessible pour 9,90 €, prix caviste.

Il est aussi question de division du côté de l’appellation Saint-Véran (sans « d », contrairement à l’orthographe du nom du village, l’AOC faisant référence au saint-patron), et toujours autour de Pouilly-Fuissé : dans les années 30, le nord de l’appellation est plantée en gamay, et ne peut donc intégrer Pouilly-Fuissé, quand au sud les vignobles étaient dédiés à la production de Beaujolais Villages blanc. L’appellation sera reconnue en 1971.

La cuvée « Maison Rouge » du domaine de la Feuillarde, en 2015, réussit le tour de force de conserver une grande fraîcheur sur ce millésime, avec une jolie finale anisée et un prix tout aussi agréable (12,80€ prix caviste).

Beautés cachées de Côte Chalonnaise et Côte de Beaune

Le voyage se poursuit avec une virée de bord vers le nord, et une halte en Côte Chalonnaise, charnière géologique entre le nord et le sud de la Bourgogne. Les sols y sont soit marneux, mêlés d’argiles et de grès (comme Buxy), ou des couches du jurassique moyen et supérieur, alternant calcaires durs et marnes friables, donnant des sols plus ou moins caillouteux et graveleux.

Ce sera l’appellation Rully qui représentera la région, reconnue AOC en 1939, avec une cuvée « Les Plantenays », du domaine Louis Max en 2015, mettant en valeur les arômes végétaux du chardonnay sur une rondeur plaisante.

Cap sur la côte de Beaune et sur les vins rouges, où le Chorey-les-Beaune du domaine Maillard Père et Fils ravit par son aromatique typique du pinot noir, tout en élégance et gourmandise : le bouquet de petits fruits rouges et une jolie structure lu conférant finesse et longueur sur une belle amertume en feront le partenaire idéal des poissons, viandes blanches et terrines diverses.

Longtemps vendus sous l’égide des « vins de Beaune », puis des « Côtes de Beaune Village », les producteurs s’émancipent peu à peu lors de l’après-guerre en commercialisant leurs vins avec le nom de leur village, avant la création de l’appellation en 1937.

C’est aussi le cas des appellations Maranges et Ladoix, qui pourtant fournissent de superbes vins, comme les Ladoix du domaine d’Ardhuy ou du domaine Catherine et Claude Marechal, ou le Ladoix blanc de Sylvain Loichet, tout en rondeur et tension.

Maranges est une appellation qui fournit des vins dotés d’une trame tannique plus importante, à l’image du 1er cru « Clos Roussots », chez Vincent Charleux, en 2015, déjà agréable à boire mais qui mérite d’être attendue quelques années. Fraîcheur et gourmandise, nez et bouche homogène : un très bon rapport prix/plaisir (14 €) !

Maranges a connu une polémique lors de son rattachement à l’une des grandes régions bourguignonnes : les trois communes qui le composent se répartissent sur l’actuelle Côte-de-Beaune mais aussi sur la Côte Châlonnaise. Mais sa « sensibilité beaunoise » l’a emportée, entraînant son rattachement à la Côte-de-Beaune.

Marsannay en majesté…

Dernier détour en Côte de Nuits, en appellation Marsannay, qui est la seule à produire des vins blancs, rouges et rosés (reconnue en 1961 pour les rosés et en 1987 pour l’appellation Marsannay). Une procédure de classement des premiers crus est actuellement en cours, et la cuvée « Trois Terres » en 2015 du domaine Jean Fournier en donne un bel aperçu.

Si les vins tranquilles sont largement majoritaires en Bourgogne, le crémant de Bourgogne ne manque pas d’intérêt, bien au contraire : son cahier des charges est le plus strict de toute la région !
Vendanges obligatoirement à la main, en grappes entières, avec usage de caisses perforées, dégustation de contrôle obligatoire du vin de base puis seconde dégustation d’agrément après la prise de mousse de 12 mois minimum….

Le crémant de la maison Louis Bouillot « Les trois saints », en 2010, offre rondeur et douceur sur une jolie tension, et est issu de vignes réparties sur les villages de Saint-Aubin, Saint-Véran et Saint-Romain.

Pour une initiation ludique et œnotouristique, l’Imagnarium situé à Nuits-Saint-Georges propose de mieux connaître la vigne mais aussi de revisiter les arcanes de la dégustation, en jouant sur l’environnement (luminosité, décor etc), afin de mettre en lumières les impacts des éléments extérieurs sur la perception sensorielle lors de la dégustation.
Instructif !