Vendredi 11 Octobre 2024
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25.04.2013
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Le Nigeria, pays le plus peuplé d’Afrique avec 160 millions d’habitants, est l’un des marchés où la consommation de Champagne augmente le plus rapidement : elle s’élevait en valeur à plus de 59 millions de dollars en 2012.
Dans une boîte de nuit branchée de Lagos, baignée dans une lumière bleutée, la soirée commence à peine, mais le hip-hop retentit à plein volume et les bouteilles de Champagne ornent déjà les tables basses, dans leur saut de glace.
« On brasse trop d’argent dans le pétrole », répond un client quadragénaire du Rhapsody, sur Victoria Island, un des quartiers chics de Lagos, quand on lui demande pourquoi les Nigérians dépensent de telles fortunes pour acheter du Champagne.
L’homme précise que c’est sa société qui règle la note, pour les deux bouteilles de Laurent-Perrier qui trônent devant lui, mais, comme beaucoup d’autres clients de ce club à la mode, il refuse de donner son nom et de dévoiler sa profession.
Le Nigeria est un des pays au monde où la consommation de Champagne augmente le plus rapidement en ce moment. 59, 34 millions de dollars y ont été consacrés à l’achat des précieuses bulles en 2012, selon la société de recherche Euromonitor International. Un chiffre en augmentation par rapport à 2011 (49 millions de dollars), et qui devrait atteindre 105 millions de dollars en 2017, selon Euromonitor.
Le Nigeria, pays le plus peuplé d’Afrique, avec 160 millions d’habitants, « est un des marchés les plus importants, pour l’avenir du Champagne », estime Spiros Malandrakis, analyste pour Euromonitor.
Selon lui, en Chine, c’est la classe moyenne émergente sur laquelle les producteurs de Champagne misent, une cible différente de celle du Nigeria. « Le cas du Nigeria, d’après ce que je comprends, est celui d’une société très divisée, une grande partie de la population appartenant à la classe ouvrière », remarque-t-il, alors que l’élite a les moyens de s’offrir les choses les plus extravagantes. Les magnats du pétrole et les stars de Nollywood, la prolifique industrie cinématographique nigériane, en quête de reconnaissance sociale, ont participé au succès local du Champagne.
Les vedettes de Hip-Hop américaines font depuis longtemps la promotion des fines bulles françaises — un réflexe adopté par la jeune scène Hip-Hop nigériane. Dans un tube sorti il y a deux ans qui passe encore sur les ondes et dans les boîtes au Nigeria, le refrain lancinant revient en boucle : « Pop-pop-pop-pop champagne ».
Le prix d’une bouteille varie selon le club et la marque, une bouteille de Moet & Chandon tournant autour des 120 dollars alors que le Cristal se vend 900 dollars et parfois plus. Dans le commerce, les prix sont bien plus bas.
Le Nigeria est un des pays les plus corrompus au monde, les revenus du pétrole étant empochés ou détournés par milliards, privant la population d’infrastructures basiques tel qu’un réseau électrique fiable. De telles dépenses en champagnes sont d’autant plus frappantes quand on les compare aux chiffres de la Banque Mondiale, selon laquelle 63% des Nigerians vivent avec un dollar par jour ou moins.
Aussi, l’écart entre riches et pauvres s’est creusé ces dernières années : une échelle de mesure dont la valeur 0 représente la parfaite égalité et le 1 représente une inégalité totale montre une augmentation des écarts de richesse, de 0, 39 en 2003-2004 à 0, 42 en 2009-2010.
« Si l’on compare au niveau international, c’est assez haut, mais pas démesuré par rapport à d’autres pays », estime John Litwack, économiste pour la Banque Mondiale au Nigeria. Mais une partie de la grande bourgeoisie nigériane n’a sans doute pas participé à cette enquête, ce qui altère ces chiffres dans une certaine mesure, selon lui.
Ceux qui ont de l’argent en ont vraiment beaucoup. Martin Kapsdorfer, le patron du Cafe Vanessa, un bar situé dans la même rue que le Rhapsody, raconte qu’un client a commandé 80 bouteilles de Champagne, récemment, pour une fête. Au Rhapsody, un homme de 38 ans qui dit être dans le commerce du marbre et du granit savoure une Guinness à la table d’un ami qui a commandé une bouteille de Moet & Chandon. Le Champagne, « c’est un truc pour le prestige », estime-t-il. « Personnellement, je déteste ça ».
Michael Smith
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